Cannabis : le piège tendu pour éviter sa légalisation

Cannabis : le piège tendu pour éviter sa légalisation
Par mrpolo ,

La contraventionalisation du cannabis proposée par Gérard Collomb ne résoudra aucun des problèmes cruciaux causés par la prohibition. Voilà pourquoi.

 

 

 

 

 

 


Le 24 mai dernier une annonce a fait du bruit dans le monde de la prohibition des drogues en France : le ministre de l’Intérieur Gérard Collomb a annoncé que, conformément au programme du candidat Macron, l’usage de cannabis sortirait du cadre pénal pour n’être sanctionné que par des amendes. Ce changement devrait advenir « dans les trois-quatre mois », a-t-il expliqué sur RMC – BFM-TV.

 

On pourrait accueillir cette nouvelle avec joie puisqu’elle tendrait à aller dans la bonne direction, celle de plus de liberté. En effet, depuis 1970 l’usage de stupéfiant est passible d’1 an de prison et 3750 euros d’amende. Le passage à un régime de contraventions peut ainsi être vu comme un assouplissement mince mais appréciable de la répression illégitime envers les usagers pacifiques de drogues.

 

L’échec de la répression

 

Plusieurs projets de loi en ce sens ont été déposés sans succès depuis une quinzaine d’années. En 2011 par exemple, une loi votée par le Sénat proposait de remplacer les condamnations pour premier usage par une amende de 3ème classe, similaire à celle des excès de vitesse. En cas d’usage répété, la personne retombait sous le coup de la loi actuelle.
Cette proposition avait été combattue par le garde des Sceaux de l’époque Michel Mercier car elle lui semblait « en contradiction avec un message de fermeté ».

 

Quand on connaît les résultats de ce « message de fermeté » après plus de 40 ans de prohibition ferme, à savoir 17 millions de Français qui ont déjà pris du cannabis dans leur vie et 700.000 usagers quotidiens selon l’OFDT, cela prêterait à sourire si les conséquences de la prohibition n’étaient pas désastreuses.

 

Des peines pénales peu appliquées

 

L’idée de la contraventionalisation de l’usage du cannabis est revenue sur la table en 2015 à l’occasion d’un rapport commandé par Manuel Valls. Ce rapport, produit par un groupe de travail de la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (MILDECA), recommandait une nouvelle fois de passer à des amendes pour sanctionner l’usage de cannabis.
La lecture de ce rapport est intéressante car pour appuyer son propos il dressait un état des lieux de la répression de l’usage de cannabis en France. En 2014, 101 019 affaires d’usage de stupéfiants ont fait l’objet d’une réponse pénale.

 

Sur ces 101 019 affaires, 33 645 connurent une condamnation pour usage de stupéfiant, parmi lesquelles 3 426 consistèrent en une peine d’emprisonnement (principalement pour des personnes récidivistes). Sur ce total, 1 345 subirent de la prison ferme, ce qui représente 4% des condamnations prononcées.

 

Fin d’une pratique scandaleuse

 

Il est heureux que cesse cette pratique scandaleuse qui consiste à enfermer des personnes pacifiques dans des cages parce qu’elles ont consommé une plante non approuvée par l’État.
De manière plus large, la contraventionalisation permettra de mettre fin à ces milliers d’heures gâchées chaque année à placer en garde à vue des usagers (environ 33 000 personnes en 2014). Enfin, un certain désengorgement des tribunaux ainsi que la fin des inscriptions sur le casier judiciaire seront là aussi d’excellentes choses.

 

Il s’agit toutefois de nuancer ce tableau en réalisant bien que les peines prévues par la loi de 1970 étaient extrêmement rarement appliquées. Sur les 170 126 usagers interpellés en 2014 en France, 0,8% ont subi une peine d’enfermement ferme, ce qui a conduit certaines personnes à évoquer une « dépénalisation de fait du cannabis ».

 

C’est bien cela qui motive les partisans de la contravention : une moindre efficacité du régime de prohibition actuel pour punir les consommateurs de drogues. Les membres du MILDECA qui ont produit le rapport expliquaient ainsi que le régime légal actuel avait le défaut d’être « globalement peu dissuasif pour les consommateurs (faible risque pénal) ».
Le but n’est ici donc pas d’alléger la répression contre les usagers, mais bien au contraire de la massifier.

 

Alors qu’aujourd’hui un contrôle se terminait très souvent par un simple avertissement et une confiscation du stupéfiant pour éviter d’entrer dans le lourd processus de pénalisation, le passage à des contraventions systématisera la répression contre des fumeurs qui ne nuisent à personne sauf à eux-mêmes. Du point de vue des usagers, ce pas qui semble à première vue aller dans la bonne direction pourrait donc bien se révéler très nocif.

 

Le désastre de la prohibition qui reste entier

 

La contraventionalisation du cannabis ne résoudra aucun des problèmes cruciaux causés par la prohibition. Dans son interview pour RMC – BFM TV, Gérard Collomb a souligné à juste titre que « on voit de plus en plus qu’il y a une articulation très forte entre trafic de stupéfiants, trafics divers d’ailleurs et terrorisme », alors que le passage à des amendes pour sanctionner l’usage ne résoudra strictement rien par rapport à tous les financements que permettent les trafics.

 

En effet, en préservant toute la forte criminalisation du côté de l’offre de cannabis, le marché noir continuera de prospérer. Toute la violence associée à ces marchés noirs perdurera, et les forces de police et justice continueront d’être monopolisés pour cette guerre sans fin qui a amplement montré son échec total.

 

La persécution continuera

 

La persécution des personnes faisant usage du cannabis pour des visées médicales continuera. Les produits continueront à être peu sûrs, mettant en danger la santé des consommateurs. Les associations qui font des efforts de prévention et de réduction des risques continueront d’être harcelées par la police et la justice alors que leur rôle est essentiel pour la santé publique.

 

Face à ce sombre constat, une seule solution s’offre à Gérard Collomb s’il souhaite mettre un terme à toutes les conséquences délétères des trafics du marché noir tout en promouvant courageusement les libertés individuelles : la légalisation complète des drogues. À travers le monde on se dirige progressivement vers cette solution indispensable… À quand la France ?

 

Par Edouard H.

 

Source::contrepoints.org


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La même chose que jusqu’à maintenant en payant en plus ^^

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Hello à toutes et à tous,

 

Ce que dit cet article n'est pas faux. Après, pour ceux qui suivent cette affaire depuis un moment, nous savons tous que la prohibition a entraîné avec elle une vision très déformée de la réalité chez la majorité des gens. C'est aussi ça que nous combattons. Ainsi, la dépénalisation va forcément produire un effet inverse dans la perception des choses. C'est surtout ça que j'attends, car c'est le nerf de la guerre. La population n'est pas encore "pour". Pour le moment, nous sommes minoritaires et c'est pour ça que depuis des années, nous avons l'impression de prêcher dans le désert. Demain, la weed aura une autre image, moins sulfureuse, moins gênante et plus acceptable. Les gens seront plus tolérants et le "pour" va gagner en poids dans la population. C'est avec l'appui du peuple que les idées progressent. Notre pays était trop divisé sur la question. Les prohibitionnistes pouvaient s'en donner à cœur joie et balancer n'importe quoi sur les ondes et les écrans. Forcement, les gens qui n'y connaissaient rien étaient facilement impressionnés et influencés par ces propos. C'est pour ça que je ne vois pas que des inconvénients à cette dépénalisation. J'attends juste un volet "prévention" qui n'existe toujours pas et qui permettraient de travailler dans le bon sens.

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l'Etat à trop de potes (avec un max de tunes) dans la mafia sinon il lui couperait l'herbe sous les pieds ....

 

 

:yepah:

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Bonjour,

 

+1 avec liloutedebordeaux

Donner au cannabis un statut de stupéfiant différent des autres est un préliminaire nécessaire à toute autre évolution ultérieure quel que soit le stupéfiant visé (à moins qu'un(e) politique courageux émerge un jour mais là on peut rêver). Soyons optimistes et patients ...

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Bonjour,

Je crois que tout dépendra d'une chose: aurez-vous une amende à partir d'un joint ou 5 g par exemple?

 

En tous cas, je m'étonne que certains trouvent ce système -dont on ne connait pas les détails- comme étant une avancée.

"Soyons optimistes et patients ..." : et pourquoi pas combatifs???

 

Vivant au pays basque espagnol, je continue à me rendre à chaque manifestation (selon mon agenda) car mes ami(e)s et moi savons que rien et gagné, qu'il faut toujours lutter. J'en ai souvent entendu ici vanter les mérites des Cannabis Social Club espagnols. On voit bien que ceux-ci n'en ont qu'une image idyllique.

J'avais déjà ici souligné le fait que les CSC ne sont pas viables,  pour la simple et bonne raison que les mafias et autres personnes mal intentionnées, sont les premières à ouvrir des CSC. Pour info, il y a quelques semaines, au nord d'Irun, un CSC a été fermé : il avait plus de 3000 sociétaires.

 

Et ce n'est pas un cas isolé! Et les petits CSC ne sont pas plus vertueux et ne sont souvent que de micro-usines à cash.

 

A noter que de plus en plus d'arrestations ont lieu à la sortie des CSC: fouille au corps, rapport etc.

 

Vu d'ici, je me dis que vous n'êtes prêts de voir la couleur du moindre CSC en France si vous continuer à attendre benoitement que les hommes politiques se penchent sur le sort "d'insignifiants fumeurs" n'ayant même pas le courage de revendiquer le droit fondamental de consommer ce qu'il leur plait.

 

Ajoutez à cela une loi à venir sur la liberté informatique qui permettra bientôt à la Police de lire vos mails et de connaitre votre historique de navigation: il ne sera alors pas très difficile aux forces de l'ordre de pister consommateurs et cannabiculteurs pour leur coller un procebal...pourquoi pas calculé en fonction des quantités saisies?

 

Je dis ça, je ne dis rien...

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bonjours

 

Moi je trouve que c'est un grand progrès, depuis 1970 rien avait bougé!!

certain disent que cela ne change rien dans les faits, mais maintenant on ne risquera plus de prison je rappele que pour consomation la loie actuel permet au juge de vous condaner a 1 ans de prison, et pour detention 10 ans de prison!!

Je suis totalement contre le faite de legaliser la consomation de cannabis sur la voi public, fumer dans la rue doit resté interdit et doit resté quelque chose que l'on fait en privé.

 

Leo

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Bonjour,

 

 

bonjours

 

Moi je trouve que c'est un grand progrès, depuis 1970 rien avait bougé!!

certain disent que cela ne change rien dans les faits, mais maintenant on ne risquera plus de prison je rappele que pour consomation la loie actuel permet au juge de vous condaner a 1 ans de prison, et pour detention 10 ans de prison!!

Je suis totalement contre le faite de legaliser la consomation de cannabis sur la voi public, fumer dans la rue doit resté interdit et doit resté quelque chose que l'on fait en privé.

 

Leo

Bonjour Leo,

 

Grand progrès dites-vous? Mais en est-ce un que d'être puni d'amende -sans doute à la tête du client par la police- pour simple détention ou consommation d'une plante, en toute ou partie,  et de ses dérivés?  Et pourquoi pas une nouvelle taxe sur le café pendant que vous y êtes! 

 

Citation à l'appui: "Le Français est un animal de basse-cour si bien domestiqué qu'il n'ose franchir aucune palissade" . Charles Baudelaire Journaux intimes (1887), Mon cœur mis à nu.

 

J'ose ajouter: en matière de revendications cannabiques, les français pas très courageux (moutonniers?) . C'est quand la dernière fois que vous avez manifesté pour vos droits???

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