Peut-on se faire retirer son permis de conduire pour avoir consommé du CBD ?

Peut-on se faire retirer son permis de conduire pour avoir consommé du CBD ?
Par Boogerman ,

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Peut-on se faire retirer son permis de conduire pour avoir consommé du CBD ?

Des automobilistes de plus en plus nombreux se plaignent de contrôles positifs au cannabis alors qu’ils ne consommaient que du CBD. Une situation rendue possible par les textes réglementaires.
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Le cannabis, sous forme de drogue, contient environ 15 % de THC ; les produits à base de CBD vendus légalement dans le commerce, eux, sont limités par la loi à 0,3 %. (EMMANUEL DUNAND/AFP)

par François Vaneeckhoutte

publié le 5 novembre 2022 à 9h19
 

Etre contrôlé positif au cannabis, et privé de permis, après avoir consommé du cannabidiol (CBD) : c’est la mésaventure qui, d’après un tweet partagé le 1er novembre, est arrivée à un jeune qui utilisait le CBD pour se sevrer du cannabis.

Attention au CBD , je vois un jeune qui a arrêté ses consos et a utilisé le CBD en sevrage , contrôlé positif , conso de CBD datant de la veille. Permis retiré immédiatement.

— Le Flohic (@DrGomi) November 1, 2022

Un cas qui ne semble pas isolé. D’autres médias, comme BFM TV ou France 3, ont relayé des histoires similaires ces dernières semaines.

 

Selon le code de la route, «le fait de conduire ou accompagner un élève conducteur après avoir fait usage de stupéfiants» entraîne automatiquement le retrait de 6 points sur le permis de conduire, ainsi qu’une peine pouvant aller, sans circonstance aggravante, jusqu’à 2 ans de prison et 4 500 euros d’amende. A cela s’ajoutent d’éventuelles suspensions ou annulations de permis, ou encore l’obligation de suivre des stages de sensibilisation.

Une question de seuils de détection

C’est le tétrahydrocannabinol (THC), molécule psychoactive également contenue dans les plants de cannabis, qui est visée par les contrôles de police. Le cannabis, sous forme de drogue, contient environ 15 % de THC ; les produits à base de CBD vendus légalement dans le commerce, eux, sont limités par la loi à 0,3 %.

Le problème vient du fait qu’aucun seuil ne définit l’usage de stupéfiants dans le Code de la Route : comme l’indique le site de la Sécurité routière, «la conduite, ou l’accompagnement d’un élève conducteur, après avoir fait usage de substances ou plantes classées comme stupéfiants, est interdite, quelle que soit la quantité absorbée». En clair, il est donc possible d’être contrôlé positif au cannabis (THC) du fait des traces de THC présentes au sein des produits au CBD consommés.

Avec, évidemment, plus de risques en cas de consommation récente ou régulière. «Les cas que j’ai eus, c’était des cas de consommation le jour même ou la veille», souligne Etienne Lejeune, avocat spécialiste en droit routier, contacté par CheckNews.

Un flou réglementaire à lever

La consommation de CBD, même si tout à fait légale, peut entraîner la détection de traces de THC lors d’un contrôle routier, et mettre les conducteurs dans l’illégalité. Une contestation est possible, mais la procédure judiciaire est longue, coûteuse et n’annule pas la suspension du permis, quasi-systématique et fortement pénalisante. Résultat, «sauf à vouloir en faire une question de principe, il y en a plein qui refusent l’obstacle», déplore Etienne Lejeune.

Pour faire face à la situation, l’avocat conseille, au moment du contrôle, de «demander un prélèvement sanguin pour contre-expertise, présenter les factures d’achat et ne pas reconnaître les faits», puis de «réaliser un prélèvement capillaire» dans les semaines qui suivent. L’Union des professionnels du CBD (UPCBD), qui recommande également aux automobilistes de «demander un test sanguin», ajoute la possibilité d’un «référé suspension devant le tribunal administratif» afin de conserver le droit de rouler.

Au-delà de ces conseils, le président de l’UPCBD, Charles Morel, avance plusieurs propositions pour sortir de cette «zone grise» réglementaire. Parmi les revendications présentées à CheckNews, «des tests fiables», différents des tests salivaires actuels, avec la mise en place d’un seuil de détection de THC «cohérent et scientifiquement fondé» sur les effets sur la conduite ou encore l’adoption d’un protocole «moins intrusif», similaire à ce qui existe au Canada.

Un débat juridique qui promet d’être mouvementé, comme en témoigne la suspension par le Conseil d’Etat du dernier arrêté gouvernemental, jugé trop restrictif, concernant le CBD. En attendant, une solution : ne pas consommer de CBD avant de prendre le volant… même si c’est légal. «En l’état, de manière pragmatique, il ne faut pas en prendre – ou suffisamment longtemps avant de conduire», appuie Etienne Lejeune.


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