L'affaire du joint "surdosé" enfin jugé

Par Invité ,

Les quatre jeunes qui avaient offert un joint aux effets désastreux à l'un de leurs camarades de lycée seront enfin fixés sur leur sort judiciaire aujourd'hui au tribunal correctionnel de Créteil. Le 15 mars 2000, ils avaient fourni une « moustache » (un double joint) contenant du haschisch de très bonne qualité à Patrick Dutertre. Pris de délire, le jeune homme, alors âgé de 18 ans, s'était jeté quelques minutes plus tard par la fenêtre du troisième étage. D'abord atteint de paraplégie, la victime a aujourd'hui retrouvé l'usage de ses jambes. Le procès de ses camarades a déjà été renvoyé à trois reprises, pour complément d'information. Outre une forte concentration en THC (le principe actif du cannabis), les analyses avaient en effet révélé dans le sang de la victime la présence d'éphédrine, un produit présent dans certains médicaments qui pourrait expliquer son geste fou. Lors de la précédente audience, le parquet avait requis de quatre à six mois de prison avec sursis contre les « dealers ».

 

Source : Le Parisien - lundi 17 mars 2003

 

Jeudi 20 Mars, du nouveau :

 

Patrick, 19 ans, avait sauté par la fenêtre: il accuse le cannabis que lui avait proposé un copain.

 

Il y a ce geste. Patrick, 19 ans, sportif et réservé, a sauté par la fenêtre après avoir fumé un joint chez Gaël, un copain de lycée. C'était le 15 mars 2000 à 13 h 15 à Fontenay-sous-Bois (Val-de-Marne).

 

Trois ans après les faits, les voilà ensemble, mercredi soir, à la barre du tribunal correctionnel de Créteil. Côte à côte. Mais les deux jeunes n'échangent aucun regard. Pas un mot. L'un est du côté des prévenus avec son frère aîné et le camarade à qui il avait acheté le cannabis ; l'autre est la victime : Patrick accuse Gaël de l'avoir incité à fumer une "moustache", un double joint de cannabis fortement dosé, et d'être responsable de sa chute du troisième étage, de ses mois de paraplégie, de son calvaire pour remarcher, de l'appareillage qui lui tient toujours la jambe gauche. Bref, d'être coupable de "délit de blessure involontaire", selon le procureur et l'avocat de la victime.

 

Geste inexplicable. Patrick n'assume pas un geste qui reste inexplicable, malgré les PV d'auditions lors de l'enquête policière, puis les expertises médico-psychologiques, mais aussi les connaissances scientifiques établies sur les effets du cannabis et, mercredi, les différents témoignages à l'audience. "Vous vous êtes senti mal, mal, mal. Des palpitations, une angoisse formidable. Vous avez eu l'impression de devenir fou, qu'il fallait que cela s'arrête et vous vous êtes défenestré ?", interroge la présidente. Patrick acquiesce. Cela faisait deux mois que Gaël lui disait que la fumette, c'était cool. Ce midi-là, Gaël l'invite chez lui avec Nicolas, un autre camarade. Sort une "moustache". Gaël et Patrick en prennent, pas Nicolas, qui préfère jouer à l'ordinateur. "Je ne l'ai pas incité, j'ai proposé", précise le prévenu.

 

Sobre. Très vite, tout tourne pour Patrick. Il s'allonge sur le lit, la musique "lui fait mal à la tête". Gaël, lui, fait chauffer les croque-monsieur à la cuisine : "Vous n'avez pas vu qu'il allait mal, qu'il était blanc, vous planiez peut-être ?", interroge la présidente. "Il est assez pâle de nature", lâche Gaël. Les trois s'attablent. "Soudain, nous avons vu Patrick aller vers la fenêtre. Nous nous sommes retournés, nous ne l'avons pas vu sauter", témoignera Nicolas, le seul sobre à ce moment-là. "Vous n'avez pas imaginé le retenir ?", interroge la présidente du tribunal. "Ça s'est passé tellement vite. Je n'ai pas réalisé, je n'ai pas vu sa détresse", murmure Gaël. Y a-t-il eu "harcèlement" d'un jeune "clean" piégé par un camarade pervers, comme le dépeint l'avocate de la victime ? Ou Patrick a-t-il mal usé de son libre arbitre ?

 

La défense invite le tribunal à ne pas faire de ce cas "unique et exceptionnel le procès des effets pervers du cannabis. Comment Gaël pouvait-il avoir conscience du risque qu'il faisait prendre ?". Alors que ce type de crise d'angoisse aiguë reste exceptionnel et mal expliqué.

 

Le procureur a requis deux ans de prison avec sursis pour Gaël et son frère. Jugement le 28 avril.

 

Source : Libération du 19 mars 2003

Lien : https://www.liberation.fr/page.php?Article=96694

 

 


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