Consommation de cannabis : une nouvelle loi s’impose-t-elle ?


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Consommation de cannabis :

une nouvelle loi s’impose-t-elle ?

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Inutile de rappeler que les voix se sont élevées après la révolution pour revendiquer la réforme de la loi 52 et la dépénalisation de la consommation du cannabis.  Plusieurs associations et activiste de la société civile ont engagé la bataille et ont crié sur tous les toits  l’urgence  des réformes. De même pendant la campagne électorale de la présidentielle, le candidat Béji Caïd Essebssi avait promis de faire réviser la loi 52. Le Parti Al-Massar  était l’un des partisans de cette réforme.

 

Il semble que la pression faite par la société civile a porté ses fruits. Lors d’une conférence nationale sur la politique du traitement de la consommation des drogues en Tunisie, organisée par ONUSIA et Westminster Foundation for Democracy, le nouveau projet de loi a été présenté  devant un parterre composé de journalistes, médecins, activistes en  droits de l’Homme et autres. Malgré les avancées que ce projet de loi présente par rapport à la loi 52, l’insatisfaction était palpable et se lisait facilement dans les déclarations des activistes de la société civile.

 

Le nouveau projet de loi a été préparé conjointement par des experts relevant du ministère de la Santé publique, celui de la Défense nationale,  de la Justice et le ministère des Affaires sociales. D’ailleurs, le ministre de la Justice, Mohamed Salah Ben Aïssa, s’est félicité ce matin, lors de son intervention inaugurale, en affirmant que le projet de loi présente une rupture définitive avec la loi 52.  Le ministre a affirmé que le nouveau projet de loi se base sur la prévention en premier lieu. De même, contrairement à la loi 52, le juge est peut commuer la peine des accusés grâce à son pouvoir discrétionnaire, chose qui n’était pas possible dans un passé récent où le juge en charge des affaires de consommation de drogues était tenu d’appliquer strictement  la loi : 1 an d’emprisonnement  et une amende  de 1000 dinars. Ainsi  le pouvoir discrétionnaire accordé aux juges présente une avancée par rapport à la loi 52.
 

Taha Ben Mohamed Ennaceur, juge chercheur au Centre des études juridiques et magistrales au sein du ministère de la Justice, lors de son exposé des caractéristique du projet de loi, a affirmé  que le projet de loi relatif à la prévention et le traitement de la consommation de cannabis émane d’une stratégie réaliste et juridique afin d’éviter les imperfections de la loi 52.

 

Le juge-chercheur a indiqué que le projet de loi considère que le consommateur est avant tout victime de son addiction qui doit donc bénéficier du traitement adéquat s’il se présente aux autorités compétentes avant que le délit ne  soit découvert.  Quant  aux dealers, les peines seront aggravées comme prévu dans l’article 59 bis.

 

Parmi les spécificités  du projet de loi, le tribunal a la possibilité de commuer la peine de détention par les travaux d’utilité publique. Evoquant les procédures d’investigation dans les crimes de drogues, l’intervenant a indiqué que grâce à cette loi, il est désormais possible d’utiliser l’interception, l’infiltration et la surveillance audiovisuelle, suite à une autorisation judiciaire.

 

Par ailleurs, le chercheur a affirmé que la responsabilité morale des entreprises  est prise en considération par la loi et le tribunal peut  prononcer jusqu’à cinq ans de suspension d’activité en cas d’implication. De même, il a indiqué que la livraison contrôlée  sera mise en place dans le cadre du projet de loi. «  Ce projet de loi prend en considération les conventions internationale et la nouvelle Constitution tunisienne et l’équation entre commuer la peine, l’incrimination et la prévention » affirme-t-il.

 

Dans la même approche, l’intervenant a indiqué que des infractions ont été commises lors du prélèvement des urines et certains accusés ont fait l’objet de chantage. Raison pour laquelle, des mesures fermes seront prise lors du prélèvement urinaire qui se fera sous la direction d’un médecin de la santé publique.

 

Cependant, les activistes  de la société civile ont certaines réserves sur le nouveau projet de loi : Ghazi Mrabet, avocat et membre fondateur de l’initiative Al-Sajin 52 demeure sceptique et critique par rapport au projet de loi. A cet égard il a rappelé  que les activistes ont revendiqué que les consommateurs n’encourent pas la prison :   « mais d’après ce que je vois, la possibilité d’être incarcéré existe toujours à cause justement du pouvoir discrétionnaire conféré au juge. Du moment qu’il peut décider de commuer la peine, il peut aussi opter pour l’emprisonnement « , remarque-t-il.

 

Quant à Tarek Grira, chef de projet dans l’Association tunisienne de lutte contre les maladies sexuellement transmissible, il regrette le fait que dans le cadre du projet de la loi, le recours aux prélèvements urinaires n’ait pas été remplacé par les nouvelles méthodes appliquées en Europe et aux USA.

 

De son côté Mohamed Bilel Mahjoubi, directeur exécutif de l’Association tunisienne de lutte contre les maladies sexuellement transmissible, il a indiqué que son association a adopté la méthode de gestion des risques  pour lutter contre la drogue : «  C’est une stratégie de proximité  qui se base sur la sensibilisation et la prévention », explique-t-il. Il a indiqué que l’association  utilise des anciens consommateurs de drogue pour sensibiliser les jeunes contre les méfaits de la drogue. Autrement dit, l’association fait appel à d’anciens consommateurs pour les former dans la sensibilisation des jeunes contre ce fléau. Cette stratégie a porté ses fruits dans certains cas.
 
Source: leconomistemaghrebin.com

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