Un de plus! Le groupe des responsables politiques de premier plan appelant à la légalisation du cannabis compte un membre supplémentaire en la personne de l’actuel président colombien Juan Manuel Santos. Un membre des plus éminents puisque, jusqu’à présent, le club était essentiellement composé de retraités et que le chef d’Etat colombien, premier producteur de cocaïne au monde et gros exportateur de marijuana, est bien placé pour parler drogues.
Parmi ces « nouvelles approches », Juan Manuel Santos propose donc la légalisation de la marijuana « à condition que tout le monde le fasse en même temps ». A la remarque du journaliste qui souligne qu’il faudra bien que quelqu’un commence, le Président répond: « Oui, et ce ne sera pas moi. » En effet, souligne-t-il, la question des drogues est en Colombie une question de sécurité nationale: « Le trafic de drogues finance la violence et les groupes armés dans notre pays. Je serai crucifié si je faisais le premier pas. » Et de suggérer que les Etats-Unis et l’Europe seraient bien mieux placés pour faire cela, puisque les drogues n’y sont « que » des questions de santé publique et de petite criminalité…
Aucun laxisme toutefois dans les propositions de celui qui fût jusqu’à l’année dernière ministre de la Défense d’Alvaro Uribe, président qui mena une guerre sans relâche à la drogue et aux groupes armés, au prix de nombreuses entorses aux droits de l’homme. Pour Juan Manuel Santos, la légalisation de la marijuana ne doit permettre que de concentrer les efforts internationaux sur la lutte contre les trafics de cocaïne ou d’héroïne, qui doit être renforcée.
Juan Manuel Santos rejoint dans ce combat d’anciens chefs d’Etat latino-américains, continent qui a énormément souffert du trafic de drogues à destination des pays du Nord. Au mois de juin, dix-neuf personnalités internationales de premier plan réunies au sein de la Global Comission on Drug Policy appelaient ainsi à une légalisation contrôlée de la marijuana et à des mesures sanitaires pour le traitement des toxicomanes aux drogues dures. L’appel avait été signé, entre autres, par les anciens présidents mexicain Zedillo, brésilien Cardoso, colombien Gaviria et suisse Dreifuss, par l’ancien secrétaire général de l’ONU Kofi Annan ou encore par Louise Arbour, Javier Solana, Richard Branson, Mario Vargas Llosa…
Un seul gouvernant en exercice avait signé cet appel: le Grec Papandréou, qui n’en est pas resté au stade des déclarations puisque son pays a, depuis, annoncé la décriminalisation de toutes les drogues. Samedi, c’était au tour du parti de gauche allemand Die Linke de se prononcer pour une légalisation, à terme, de l’usage de toutes les drogues.
La France n’est pas en reste. Pendant la campagne des primaires socialistes, Martine Aubry s’est déclarée pour la dépénalisation du cannabis, une première pour un dirigeant du PS, tandis qu’un rapport sur la légalisation contrôlée, signé de l’ancien ministre de l’Intérieur Daniel Vaillant, attend toujours sur le bureau du groupe socialiste à l’Assemblée.
Arnaud Aubron