Dossier legislation française


Messages recommandés

Je me permet de vous soumettre un très bon dossier proposé par par nouvelobs.com.

 

Le dossier se trouve à cette adresse https://permanent.nouvelobs.com/dossiers/20040203.OBS0020.html

 

Ce dossier est en fait un regroupement des informations relatives au cannabis, donc nous avons :

- la partie legislation où vous pourrez y trouver toutes les lois françaises et européennes se raprochant de près ou de loin au cannabis en passant par la consommation, la detention, la vente, l'importation, la fabrication...

- les sites du gouvernement sur les drogues et la santé

- les sites d'informations génerales sur le cannabis (mais doivent surement manquer d'objectivité du à l'article L. 5132-7 du code de la santé publique)

- les sites anti-légalisation

- les site anti-repression

- bien sur, la liste des articles publiés par le nouvelobs.com.

 

N'oubliez pas non plus la première partie (tout en haut) qui pointe sur l'appel du nouvelobs.com pour la "législation encadrée du cannabis" proposé par le directeur de la rédaction.

 

Pour rappel, les articles parus sur cannaweed.com :

Politique : Pour une "légalisation encadrée du cannabis" paru le 21/05/05, proposé par pilpoil1983

Politique : France : Appel à la légalisation paru le 24/08/04 proposé par Cool

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  • 1 an après ...
  • 1 mois après ...

les liens se trouvent dans "risques encourus en france"

 

 

 

Salut,

 

Du lien concernant ce qui est "mandats" et autres en France:

celui-la pour la perqui entre autres

perqui

 

et celui là avec des liens hypertextes commepour l'autre. Donc fouillez:

...et autres

 

Sur ce, ciao, et le mieux vous le savez bien c'est d'être (très)prudent voire parano.

 

RICO.

 

EDIT: j'espere que les liens ne seront pas des doublons déjà donnés précedemment

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  • 7 mois après ...

Salutations amis de la weed

Il arrive parfois que les policiers ou gendarmes veuillent perquisitionner votre domicile, hors si vous leurs demandez si ils ont un mandat ils répondent qu'ils n'en ont pas besoin...:davb:

 

Il ne faut peut-être pas de mandat (effet des séries américaines :fem:) mais il faut bien une commission rogatoire, ce qui revient au même.

 

Sinon, voila quelques infos, datant de 1998, ça a peut-etre changé (auquel cas n'hésitez pas à me corriger svp) mais l'idée est là.

 

La garde à vue qui peut s'appliquer à un jeune homme qui a une barrette de shit est de quatre jours avec un avocat au bout de 72 heures.

 

En trafic de stupéfiant on peut faire des perquisitions de nuit, alors que c'est interdit dans toutes les autres infractions et que c'est contraire aux droits de l'homme.

 

L'usage de stupéfiant est un délit (seul le trafic, depuis le nouveau code pénal, est criminel) sa prescription est de 3 ans ! Aussi quand on vous demande si vous fumez: pas depuis 3 ans!

 

Encore de la stigmatisation... :-(

 

Source, Circ paris Conférence du Grep-mp 7 novembre 1998

par Francis Caballero

avocat à la Cour, professeur de droit

président du Mouvement de libéralisation contrôlée

++

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  • 2 semaines après ...

Bonjour

Pour vous défendre en région parisienne ou ailleur si vous avez les moyens... faut pas rever un avocat reste cher... ;-)

 

Me Francis Caballero

Avocat

Président du Mouvement pour la Légalisation Contrôlée

 

147 av Malakoff 75116 PARIS

Tel: 01 40 67 74 00

01 40 67 97 80

fax : 01 40 67 75 23

 

Edit2008: A pris sa retraite hélas........ voir à son cabinet...

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Salut,

je viens de tomber sur le site du senat ou j'ai trouver ca

Auditions de la commission d'enquête sur la politique nationale de lutte contre les drogues illicites

 

J'ai regarder l'audition de M. Francis Caballero et ca fait plaisir , maintenant vous attendez pas a grand chose de la part des autres pour l'instant j'ai vu que des prohibitionnistes .

 

Mention special a Nicolas Sarkosy que j'ecoute en ce moment , il est en train de critiquer les testing des "equtazy" ( comme il le dit si bien XD ) et grrrr il me donne envie d'lui mettre des tartes :-x .

Et pour lui soit t'est un experimentateur , soit t'est un toxico , franchement plus ca vas et plus je le sent mal :-P .

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  • 1 mois après ...

Salut à tous en ce début d'ete 2007

 

Les tests salivaires ça y est...

 

Cette opération, lancée en fanfare par le nouveau ministre de l’Intérieur, pressé de prouver son efficacité, sera menée tout l’été par la police dans 10 villes (Paris, Lyon, Marseille, Bordeaux, Toulouse, Strasbourg, Rennes, Montpellier, Lille et Nice) et dans trois régions par la gendarmerie (Pays de la Loire, Centre, Lorraine).

Outre le fait de protéger les citoyens des chauffards consommateurs de substances illicites, le dépistage salivaire aura cet autre avantage, celui de renflouer considérablement les caisses de l’Etat. En effet, un conducteur testé positif est passible de 4 500 € d’amende, de deux ans de prison et d’un retrait de six points sur son permis. Pire, s’il cumule drogue et alcool, c’est le jackpot, l’amende s’élève à 9 000 €, on passe à trois ans de prison et la possibilité du retrait du permis.

N'oubliez pas les peines plancher quand vous aurez récupéré votre permis :fumette:

L'été sera chaud

++

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  • 3 mois après ...

France : la nouvelle loi sur la récidive révèle ses effets pervers

source: Premièreslignes.ch

 

Le Monde de samedi (13/10/07) qui dresse un premier bilan de la loi sur la récidive, affirme qu’elle «révèle ses effets pervers» en conduisant «à la prison (…) des hommes et des femmes en déroute sociale après une première condamnation».

 

Notant que ce texte «rigidifie considérablement l’échelle des peines», le journal explique que lorsque le prévenu a déjà commis au cours des cinq dernières année, une infraction identique à celle pour laquelle il comparaît, il est en «récidive légale», la loi imposant alors une peine plancher qui représente «un peu plus du tiers de le peine maximale». Le vice procureur d’une grande juridiction du Sud ouest déclare «on arrive à des sanctions absurdes, j’ai vu en comparution immédiate, un jeune homme de 20 ans qui a acquis 2 grammes de cannabis en récidive pour sa consommation personnelle. La peine plancher est de quatre ans ferme, c’est totalement disproportionné !».

 

Le quotidien qui observe que «le droit pénal procède par grandes infractions», précise qu’ainsi la cession de stupéfiants recouvre des délinquances très différentes mais qu’elle «peut être retenue pour un trafic international de 3 tonnes d’héroïne comme pour la revente d’une barrette de cannabis sur le trottoir», sachant qu’auparavant les magistrats prenaient en compte ces disparités mais qu’avec la loi du 10 août «sauf exception, l’infraction suffit désormais à définir la peine».

 

Evoquant cet ancien toxicomane condamné en 2004 pour «trafic de drogue dure» et réinséré depuis, qui comparaissait cet été pour l’achat de deux barrettes de cannabis destinées à sa consommation personnelle, le journal rapporte le point de vue du vice président du tribunal de Bobigny «Aux yeux de la loi, c’est une récidive légale de détention de stupéfiants. Il y a pourtant un monde entre le délinquant de 2004 et l’homme en voie de réinsertion de cet été. En matière de toxicomanie, une sortie de délinquance ne se fait pas d’un coup de baguette magique : c’est long, difficile, il y a (…) des rechutes» et il ajoute «Dans ce cas la peine plancher est fixée à quatre ans ferme, ce qui est totalement contre productif. En lui faisant perdre son travail, en fragilisant sa vie affective, en compromettant son suivi médical, cette peine réduit à néant trois ans d’effort et risque de le faire replonger dans la drogue et la délinquance après sa sortie de prison».

 

D’après le journal, pour cet homme, le magistrat a pu éviter la peine plancher en invoquant «la personnalité du prévenu» et les «circonstances de l’infraction», sachant qu’en cas de récidive aggravée (deuxième récidive) il «aurait eu bien du mal à le faire sortir du carcan imposé par la loi», «un exercice quasiment impossible» selon une parquetière.

Je vous livre cet article édifiant mais sans réelle surprise, on s'y attendait bien avec notre politique prohibitionniste sur-répressive...

On aura la même pour les producteurs ou l'usager attrapé deux fois en cinq ans hélas...

Merci à notre état de nous protéger en nous mettant en taule!

Cannabiquement Mrpolo

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  • 2 semaines après ...

De toute façon maintenant que l'Europe existe un jour où l'autre, la France sera obligé d'y passé pas forcément a la légalisation mais avoir le droit d'en consommée, sa me tue moi en voyant l'alchol en vente libre dire que c'est la pire des merde de boire moi je dit si la France fais comme aux Pays-Bas a savoir des Coffee-Shop où l'état touche une part par produits vendu LE TROU DE LA SECU SERA BOUCHE et la France aura plus de problème de fric faut qu'il arrête de déconné avec leurs réformes de merde ya une drogue encore plus dure que le cannabis : L'alchol.. et c'est en vente libre. :-(

 

Maintenant si on te choppe avec un pied chez toi la peine encourue est encore pire que pour un pédophile stop la connerie quoi.. :-x

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  • 1 an après ...

Les politiques publiques de lutte contre les drogues

 

Par Yann Bisiou

Docteur en droit privé

Université Paul Valéry - Montpellier III

 

ND Mrpolo: Les notes bibliographiques sont groupées en fin de post, hélas sans lien hypertexte que je ne sais pas gérer sur le site. désolé ;)

 

 

Résumé : Depuis le XVIIIème siècle, les drogues sont soumises à un contrôle étatique dont l'objet varie selon les lieux et les époques. Tantôt il s'agit de favoriser l'usage de drogues dans un but commercial (comme pour le vin) ou fiscal (comme pour le tabac en métropole, l'opium et le cannabis dans les colonies françaises). Tantôt il s'agit de limiter l'usage des drogues, au nom de considérations morales et religieuses ou de la santé publique. Le sort de l'usager, sa santé, ne deviennent une préoccupation majeure des politiques publiques que très récemment, au milieu des années quatre-vingt dix. Aujourd'hui, la priorité donnée au soin est de nouveau abandonnée au profit d'une répression accrue plus symbolique qu'efficace.

 

 

Introduction

 

 

 

 

1. Les politiques publiques en matière de drogues soulèvent bien des interrogations. Pourquoi faire une différence entre cannabis et alcool en pénalisant l’un et favorisant l’autre ? Pourquoi ne pas interdire la vente de tabac aux mineurs ? Pourquoi tolérer la publicité pour les boissons alcoolisées ? Cette présentation n’a pas pour ambition de répondre à ces questions mais de vous soumettre quelques éléments de réflexion sur les grands axes de ces politiques et, éventuellement, leurs contradictions. Toutefois, avant d’aller plus loin dans l’analyse, une précision s’impose à propos de la notion de « Drogues ».

 

 

 

2. La notion de « drogues » tel que nous l’entendons aujourd’hui est récente. Appliquée à l’ensemble des substances licites ou illicites, stupéfiants, tabac, alcool, elle n’est réellement consacrée qu’en 1998 dans le rapport Roques[1]. Nous allons donc reconstruire sous ce vocable un objet qui n’était pas perçu comme tel il y a de cela quelques années.

 

 

 

3. Pour autant cette reconstruction est justifiée. Ce que nous qualifions de « drogues » aujourd’hui ressortit, dès le XVIIIème siècle d’une catégorie unique : les « substances vicieuses ». C’est l’économiste Montyon qui le premier propose cette notion dans le cadre d’une réflexion sur la fiscalité en suggérant de taxer les comportements immoraux[2]. À la fin du XIXème siècle, dans une thèse consacrée au monopole du tabac, un auteur définit ces « substances vicieuses » comme les biens dont « la consommation nuisible ou au moins inutile ne procure aucun avantage à l'organisme et qui ne sont que des excitants pernicieux du système nerveux »[3]. Ces « substances vicieuses » sont donc des produits somptuaires de consommation courante qui ne sont pas nécessaires à la subsistance des individus et sont même dangereux pour la santé. Cela justifie que l’État se préoccupe de leur commerce et, de façon accessoire, de leur usage. On constate ainsi que toutes les substances que nous qualifions de « drogues » aujourd’hui font l’objet d’un commerce réglementé depuis le XVIIIème siècle.

 

 

 

4. Néanmoins, si la notion de « drogues » est cohérente, si elle justifie une réglementation de l’offre et parfois de la demande, elle ne se traduit pas par un régime juridique unique. Chaque drogue a un statut spécifique, chaque drogue fait l’objet d’une législation spéciale dont le but varie selon les époques et les pays. Tour à tour, les politiques publiques sont ainsi destinées à favoriser l’offre de drogues (1) ou, au contraire, à limiter cette offre de drogues (2).

 

 

 

1. Favoriser l’offre de drogues

 

 

 

5. Que ce soit pour des raisons économiques ou fiscales, la réglementation peut d’abord favoriser l’offre de drogues. Les équilibres financiers sont privilégiés au détriment des préoccupations de santé publique.

 

 

 

1.1. Les préoccupations économiques

 

 

 

 

6. C’est avec l’alcool et surtout le vin, que les préoccupations économiques sont les plus sensibles. On refuse même au vin le qualificatif de « drogue » et certains parlementaires déclarent qu’assimiler le vin à une drogue constitue « une injure aux producteurs de cette boisson noble par excellence »[4]. On rappellera tout de même ici que le vin représente l’essentiel des 10 litres d’alcool pur par an et par habitant consommés par les français (35 millions d’hectolitres en 1998). Il est également la cause de 60 % des problèmes d’alcoolisme en France[5] et de 3 % des hospitalisations en moyenne journalière[6]. Du point de vue de la santé publique, sa consommation constitue donc un enjeu majeur.

 

 

 

7. Dans le même temps, la France compte plus de 600 000 viticulteurs. Leur production constitue la principale activité économique de plusieurs régions, Languedoc, Bordelais, Bourgogne, Pays de Loire, Champagne, plaçant la France au deuxième rang mondial des pays producteurs après l’Italie. La réglementation française est donc destinée à favoriser cette expansion commerciale de la filière viti-vinicole grâce à des aides aux producteurs et des mesures de soutien des cours, (politique des labels AOC ou VDQS, gestion des excédents de production ainsi dégagés, etc…). Plus largement c’est toute l’Union européenne qui est concernée. L’Europe concentre à elle seule plus de 50% des exportations mondiales de vin, et la vigne représente près de 14% de la production agricole … contre 8% pour le blé.

 

 

 

8. Dans ce contexte, les préoccupations sanitaires passent au second plan. La science est même appelée à la rescousse pour légitimer cette production. À la fin du XIXème siècle une nouvelle discipline apparaît, la « géographie de la santé ». Ses premiers travaux sont consacrés à l’étude de l’alcoolisme en France. Une carte est produite qui fait apparaître un contraste entre les zones de production viticoles et les zones touchées par l’alcoolisme. Louis Lunier en tire un aphorisme resté célèbre : « le vin chasse l’alcool »[7]. Cette carte était fausse[8]. Elle privilégiait les alcools distillés, sous-estimant ainsi l’impact du vin. La même carte construite sur une base homogène en tenant compte de la consommation d’alcool pur par an et par habitant donne un tout autre résultat où le vin ne chasse plus l’alcool.

 

 

 

9. Aujourd’hui le soutien au secteur vitivinicole reste fort. Le lobby est puissant et sait mobiliser ses réseaux comme le montre l’affaire dite des « buvettes ». Afin de prévenir les conséquences dramatiques qui résultent parfois de la consommation abusive d’alcool à l’occasion des manifestations sportives, la loi « Évin » interdit toute vente de boissons alcoolisées dans les stades[9]. À titre d’exception, les Préfets peuvent néanmoins autoriser l’ouverture d’un débit temporaire vendant des boissons peu alcoolisées (vin, bière) une fois dans l’année[10]. Dans le même sens, la loi « Barnier » sanctionne d’une amende de 7 500 €. le fait de pénétrer dans une enceinte sportive en état d’ivresse[11]. La peine est même portée à 15 000€. d’amende et un an d’emprisonnement lorsque la personne s’introduit en fraude ou par la force dans cette enceinte. Cet édifice juridique cohérent qui affirme clairement la priorité donnée à la santé et à la sécurité publique est bientôt remis en cause par un groupe de parlementaires bretons. En 1996, ils tentent de faire adopter un « amendement buvette » destiné à assouplir les conditions de vente d’alcool dans les stades. L’amendement est repoussé mais, par décret, le gouvernement porte de une à dix, les autorisations temporaires d’ouvertures[12]. En clair, chaque mois durant la saison sportive, les clubs peuvent vendre des boissons alcoolisées. Le Conseil d’État ne s’y trompe pas et annule ce décret qui contredit les préoccupations de santé publique affichées par la loi[13]. Mais le « lobby des buvettes » ne désarme pas. Un mois après la décision de la Haute juridiction, il réintroduit « l’amendement buvette » dans la loi de finance pour 1999, avec succès cette fois[14]. Non seulement le nombre d’autorisations annuelles d’ouverture est porté à dix, mais les buvettes sont autorisées à vendre les boissons du troisième groupe plus fortement alcoolisées (apéritifs, liqueurs et vins doux titrant 18° d’alcool pur).

 

 

 

10. Le « lobby des buvettes » reçoit alors le soutien inattendu de la Commission de codification. Au lieu de se limiter à une codification « à droit constant » de la loi Évin, la commission supprime la limite des dix autorisations annuelles dans le nouveau code de la santé publique (art. L.3335-4). Sans doute s’agit-il d’une « erreur » parmi de nombreuses autres (voir infra) puisque le législateur rétablit cette limite six mois plus tard dans la loi de finance pour 2001[15]. Au passage, le Préfet se voit dépossédé du pouvoir d’octroyer les fameuses dérogations au profit des maires. « C’est pour le sport, sujet extrêmement sensible, une excellente nouvelle » s’empressa d’indiquer le secrétaire d’État à l’industrie dont la compétence en la matière n’était pourtant pas évidente[16]. Nous penserons plutôt que la cohérence du dispositif n’en sort pas grandie. Les maires peuvent à la fois présider un club sportif amateur et décider d’autoriser l’ouverture de débits de boissons sur les stades ; une excellente nouvelle pour le sport, n’en doutons pas. Quant aux supporters, ils ne doivent pas entrer en état d’ivresse dans une enceinte sportive … mais ils peuvent ensuite y consommer de l’alcool à volonté pour soutenir les finances de leur club. Il n’est pas certain que la prévention du hooliganisme ait gagné à ce nouveau système.

 

 

 

11. Cette contradiction entre préoccupations commerciales et préoccupations sanitaires trouve un écho au niveau communautaire dans la Politique Agricole Commune. Nous avons déjà évoqué l’importance que la production viticole prend dans l’agriculture européenne. La PAC subventionne la culture des principales drogues licites, vigne ou tabac et même, depuis 1970, la culture de chanvre avec des résultats flatteurs. Les surfaces cultivées en chanvre se sont accrues de près de 40 % par an depuis la fin des années quatre-vingt-dix et le rendement a été multiplié par deux[17]. Il s’agit, dira-t-on, d’une politique qui permet en plus de lutter contre la production illicite puisque seules les variétés dépourvues de THC sont subventionnées[18].

 

 

 

12. Pourtant, cette politique n’est pas sans effet sur la prohibition, par l’image positive qu’elle donne de la plante, et par l’impact qu’elle a sur les infractions relatives aux stupéfiants. Deux affaires pendantes l’illustrent. La première concerne les infractions de provocation à l’usage et de présentation sous un jour favorable. La Grèce interdit, à ce titre, toute représentation commerciale du cannabis. Une telle restriction à la liberté d’expression a toujours été admise, en raison de son intérêt sanitaire[19]. Mais elle est combattue par la commission européenne qui, dans une procédure d’infraction intentée il y a deux ans, considère qu’elle constitue une entrave au libre commerce des produits à base de chanvre licite[20]. Des poursuites comme celles qui ont été diligentées en France contre des fabricants de crème pour les mains ou de boissons à base de chanvre seraient donc contraires aux traités européens[21]. Si l’on peut adresser de nombreux reproches à la définition de la provocation au trafic ou à l’usage au regard de la liberté d’expression, il est évident que les produits licites à base de chanvre exploitent l’image de l’interdit associée aux stupéfiants à des fins commerciales et constituent bel et bien une provocation à l’usage de ces substances.

 

 

 

13. La seconde affaire, pendante devant la Cour de justice des communautés européenne (CJCE), est plus intéressante encore[22]. Elle soulève la question de l’interdiction totale de la culture du cannabis et, incidemment celle du classement de l’ensemble de la plante de cannabis parmi les stupéfiants sans référence au taux de THC comme cela se pratique en Suède ou en France. Un ressortissant suédois est poursuivi pour avoir cultivé du cannabis. Il prétend que c’est pour un usage industriel et trouve le soutien de la Commission. Celle-ci combat l’interdiction générale de la culture du cannabis qui existe en Suède au nom du marché commun du chanvre. Elle affirme notamment que « les difficultés en matière de contrôle [du trafic] ne peuvent fournir une justification à l'entrave [au commerce du cannabis industriel] » (§31). Et l’avocat général prend le même parti dans ses conclusions. Il estime que le droit communautaire oblige les États à autoriser la culture du cannabis à des fins industrielles, et que le contrôle du trafic ne peut justifier une interdiction absolue. Incidemment, l’avocat général rappelle encore que les conventions internationales ne considèrent comme stupéfiants que les sommités florifères de la plante femelle du cannabis et non toute la plante de cannabis, et qu’elles n’exigent pas l’interdiction de la culture du cannabis. Elles demandent seulement aux États de prendre des mesures pour empêcher la culture illicite. De là à considérer que les États sont allés trop loin en classant toute la plante de cannabis…

 

 

 

14. Cette logique commerciale appliquée à des substances illicites conduit à des situations encore plus paradoxales. Ainsi, pour éviter les distorsions dans la concurrence, la CJCE est-elle contrainte d’autoriser la taxation du cannabis lorsque sa vente, bien qu’interdite en droit, est tolérée en fait comme aux Pays-Bas[23]. L’objectif est alors d’éviter que le cannabis ne bénéficie de conditions de commercialisation plus favorables que l’alcool en raison de son illicéïté de principe. On sait que le fisc ne s’embarrasse pas de préoccupations morales mais il faut une certaine imagination pour se représenter le trafiquant de cannabis, dont l’activité est prohibée en droit, se présentant au Centre des Impôts pour déclarer la TVA sur ses ventes … Cela nous amène à la seconde motivation qui peut pousser les États à promouvoir les drogues : les considérations fiscales.

 

 

 

1.2.Les préoccupations fiscales

 

 

 

 

 

15. Le fisc comme les douanes ont longtemps favorisé le commerce des drogues à des fins budgétaires. Outre la taxation des différentes drogues, ces préoccupations budgétaires incitent les autorités françaises à instaurer des monopoles fiscaux des drogues. En France, le premier monopole est celui des tabacs que Colbert fonde en 1674. Les fermiers généraux à qui l’exploitation de ce monopole avait été concédée y ont gagné une sinistre réputation.

 

 

 

16. En Indochine, c’est un monopole de l’opium ambitieux que Paul Doumer instaure en 1899[24]. Les Douanes françaises sont chargées d’importer l’opium brut acheté en Inde ou à la bourse de l’opium à Hongkong et de le préparer pour la consommation dans des usines d’État, les « bouilleries ». Celle de Saigon fait la fierté des Douanes ; sa visite est au programme de tous les plénipotentiaires de passage dans la colonie[25]. D’autres monopoles comparables sont développés dans les autres colonies, que ce soit sur l’opium (en Océanie)[26], sur le cannabis (au Maroc[27] ou en Tunisie[28]) ou sur les deux substances (dans les comptoirs de l’Inde[29]).

 

 

 

17. L’intérêt fiscal de ces monopoles est considérable. Ils représentent la seconde recette des budgets coloniaux après les droits d’importation. En Indochine, l’opium fournit en moyenne 20 % des ressources de la colonie, avec un maximum de 42 % en 1918. Au nom de la réalité budgétaire, on justifie alors une politique commerciale agressive qui accroît le nombre des consommateurs sans souci de la santé publique. On connaît aujourd’hui les difficultés qu’il y a à lutter contre la publicité pour le vin ou le tabac ; les mêmes réticences font obstacle à toute action sanitaire de lutte contre l’opiomanie ou l’usage de cannabis dans les colonies françaises. On invoque, avec un certain racisme, le « fatalisme de l’intoxication ». Les chinois fumeraient de toute façon l’opium, les marocain le kif. Aux Conférences Internationales de lutte contre l’opium, la France est d’abord représentée par le directeur de la Régie Indochinoise de l’opium. Quelque temps après, un autre représentant français explique benoîtement dans un ouvrage qu’on ne peut comprendre la question de l’opium si l’on n’a pas soi-même expérimenté la drogue... Avec de pareils représentants, il est inutile de dire que la France est réticente à prohiber l’opium dans ses colonies[30] ! Les émissaires français font d’ailleurs preuve d’une imagination qui n’a d’égal que leur mauvaise foi pour défendre les monopoles fiscaux. En 1908, ils invoquent le risque d’incendie à Shanghai pour refuser la fermeture des fumeries publiques : laissés seuls chez eux, les fumeurs enivrés pourraient renverser la lampe à huile qu’ils utilisent propageant le feu aux maisons de bois[31]. En 1918, pour justifier le maintien du monopole, le gouvernement d’Indochine propose encore de confier la gérance des débits d’opium aux veuves et orphelins de fonctionnaires « bons serviteurs de l’État pour compenser une lacune dans la charité publique »[32]. La pratique était il est vrai expérimentée en France, pour les débits de tabac, au bénéfice des veuves de guerre.

 

 

 

18. Il faut attendre que l’intérêt fiscal des monopoles disparaisse du fait de la décolonisation ou de la chute des revenus tirés de la drogue pour que la France s’engage résolument dans la prohibition des stupéfiants. C’est la seconde orientation des politiques publiques qui consiste à limiter l’offre de drogue

 

 

 

2. Limiter l’offre de drogues

 

 

 

19. Les autorités morales d’abord, puis des considérations de santé publique ont favorisé son développement.

 

 

 

 

2.1. Les préoccupations morales

 

 

 

 

20. Les autorités morales et religieuses jouent un rôle déterminant dans l’instauration de régimes prohibitionnistes. Toutes les grandes religions prohibent la consommation de drogue. On sait bien évidemment que le Coran interdit l’alcool. On sait moins qu’au XIXème siècle, les Oulémas de Fez – plus haute autorité religieuse du Maroc – avaient également interdit l’usage du kif. Ils se fondaient sur deux sourates l’une qui déclare que « le croyant ne sera digne de ce nom que lorsqu'il voudra pour son frère croyant ce qu'il désire pour lui-même » l’autre de Dieu disant du Prophète « Il les autorisera à user des bonnes choses et il leur défendra les mauvaises »[33]. De même l’opium est proscrit pas la religion bouddhiste qui prône l’abstinence[34].

 

 

 

21. La position de l’Église catholique est plus intéressante encore. Elle se montre d’abord très répressive que ce soit pour le tabac ou l’opium[35]. L’usage de tabac est frappé d’excommunication par les papes Urbain VIII et Innocent XII. Plus tard le prêtre doit refuser les sacrements à celui qui consomme, cultive ou donne à bail un champs pour la culture de l’opium. Mais après le milieu du XIXème siècle, la doctrine de l’Église s’affine. Elle est en effet confrontée à une difficulté particulière : elle prohibe l’opium – drogue de l’Orient – mais sanctifie le vin que certains commencent à considérer comme le poison de l’Occident. Le Pape Léon XIII distingue alors l’usage et l’abus[36]. L’usage d’une drogue n’est pas blâmable en soi. On peut ainsi consommer de l’opium pour des besoins médicaux[37]. En revanche, l’abus, l’ivresse, doit être proscrit. La particularité de l’opium est qu’il conduit très fréquemment de l’usage à l’abus. C’est donc pour prévenir cet abus qu’il convient d’interdire l’usage lui-même.

 

 

 

22. La doctrine protestante ne s’engage pas dans de telles distinctions. L’usage, l’abus ou le commerce sont proscrits sauf pour les nécessités de la médecine. Les Protestants, comme les anglicans, s’emploient à donner corps à cette prohibition. Ainsi, c’est au Pasteur Viénot qu’est due la suppression du monopole de l’Opium en Océanie dès 1916[38]. Mais c’est surtout aux États-Unis que l’action des Protestants est la plus vive avec la prohibition de l’alcool entre 1919 et 1933 (Volstead Act) et surtout la prohibition internationale de l’opium initiée à partir de 1906 par l’archevêque anglican de Manille, Mgr Brent[39]. Mgr Brent est le premier à formuler deux principes qui fondent encore le droit des stupéfiants : la distinction des besoins médicaux et hédonistes d’une part, et la nécessité d’un contrôle international des drogues d’autre part. Son action morale est ensuite relayée par des préoccupations plus séculières liées à la santé publique.

 

 

2.2. Les préoccupations sanitaires

 

 

 

23. Les préoccupations de santé publique sont les dernières à justifier un contrôle des drogues. Elles connaissent une évolution considérable entre le début du XXème siècle et aujourd’hui. D’abord tournées vers la protection de la société à travers l’organisation de la lutte contre les fléaux sociaux elles se sont orientées vers l’assistance aux usagers, la lutte contre les maladies et les dépendances. Aujourd’hui un nouveau mouvement se dessine. La disparition progressive de l’ordre public sanitaire s’accompagne d’un renforcement de l’ordre public général. La pénalisation de tous les comportements liés à l’usage se renforce de façon parfois déraisonnable comme nous aurons l’occasion de le préciser en forme de conclusion.

 

 

 

2.3. La lutte contre les fléaux sociaux

 

 

 

24. Dans un premier temps, les politiques de santé publique sont indissociables des préoccupations de sécurité publique. Si les drogues sont prohibées, si leur commerce est strictement réglementé, c’est d’abord pour des questions de sécurité publique. Le discours sur la dégénérescence de la race et sur les fléaux sociaux ne traduit pas seulement une crainte sanitaire ; il traduit une crainte sécuritaire. Les relations entre les armées et les drogues sont exemplaires à cet égard.

 

 

 

25. Les militaires tout à la fois soutiennent et s’inquiètent de l’usage de drogues. Thiers désapprouve l’usage du tabac « chez les habitants paisibles de nos cités » mais le déclare utile « aux marins contre le scorbut et aux militaires contre les souffrances du Bivouac »[40]. Mais quand la drogue prend trop d’importance, l’armée s’inquiète. On cite le mot du Général commandant le corps expéditionnaire en Indochine à qui le Gouverneur de la colonie demandait de rapatrier tous les soldats alcooliques et opiomanes. Il répondit en s’exclamant « mais c’est l’évacuation que vous demandez là ! »[41]. Toutes les grandes lois prohibitionnistes du début du XXème siècle (absinthe en 1915[42] ; stupéfiants en 1916) s’expliquent par la crainte de voir l’armée française perdre sa vigueur sous l’effet de certains alcools ou de certains stupéfiants comme la cocaïne dont le commerce est censé être contrôlé par les allemands. En 1915 justement, un député écrit dans une tirade patriotique du plus bel effet : « ils ne se contentent pas de nous envoyer des gaz asphyxiants et des bombes méphitiques. Ils essayent de nous empoisonner autrement … Est-il dans la langue humaine des mots pour qualifier le procédé d’ennemis qui, désespérant de nous vaincre sur les champs de bataille, s’attaquent aux sources mêmes de la vie chez une nation qu’ils savent trop forte pour pouvoir être domptée par les seules armes dont les peuples avaient jusqu’ici coutume de se servir? Aux massacres des vieillards, des femmes, des enfants, des non-combattants, aux traîtrises du drapeau blanc, des feintes redditions, des embuscades illicites, des avions maquillés, ils ajoutent maintenant la vente, par des mercantis scélérats, de poisons qui anéantissent à brève échéance les forces vives d’un certain nombre des nôtres »[43]. Il ne s’agit pas de protéger les usagers mais bien d’assurer la victoire des troupes .

 

 

 

26. Des préoccupations comparables quoique moins bellicistes se retrouvent lors de l’adoption de la loi de 1954 sur le placement des alcooliques dangereux[44] ou dans celle de 1970 sur la toxicomanie. La prohibition de l’usage simple de stupéfiants est alors justifiée par la nécessité de faciliter le contrôle du trafic, mais également par des craintes exprimées pour la société entière. Il s’agit moins de protéger les usagers que de protéger la société contre l’expansion du fléau de l’alcool ou de la toxicomanie. Ainsi, on fait d’abord valoir le coût de ces consommations pour la sécurité sociale[45] avant d’avancer deux théories plus ou moins douteuses, celle de l’escalade et surtout celle de l’épidémie qui s’appuie sur le prosélytisme des drogués, danger pour la société française[46].

 

 

 

2.4. La lutte contre les dépendances

 

 

 

 

27. Ces préoccupations dictées par l’intérêt de la société s’effacent à partir des années 1990 au profit d’une réflexion centrée sur la santé des usagers eux-mêmes. La cause en est simple, c’est la diffusion du SIDA dans la communauté des héroïnomanes par voie intraveineuse. Elle impose la politique dite de « réduction des risques ». L’offre de drogue est considérée comme un fait, une réalité qui certes doit être combattue mais également accompagnée, sans incitation, afin de protéger les usagers. L’accès aux seringues stériles est facilité, le « testing » et même les salles d’injection sont envisagés. Les politiques publiques vont plus loin encore en fournissant certaines drogues aux usagers, méthadone, subutex® et, dans certains pays, morphine ou héroïne. En France toutefois, ces politiques de réductions des risques se heurtent à de fortes réticences. Un ancien ministre de l’Intérieur n’hésitera pas à affirmer qu’il faut « une certaine naïveté pour imaginer que les toxicomanes soient accessibles aux règles d’hygiène qu’on voudrait leur faire observer »[47]. Il faut attendre le plan triennal de lutte contre la drogue de 1999 pour que la priorité soit clairement donnée aux soins et à la réduction des risques dans la lutte contre l’usage de stupéfiants.

 

 

 

28. Le nouveau Code de la santé publique entré en vigueur en juin 2000 consacre cette orientation[48]. La lutte contre les fléaux sociaux disparaît au profit d’une lutte contre les maladies et les dépendances. La protection de la société n’est plus le fondement de cette politique ; c’est l’usager qui est placé au centre du dispositif. Diverses mesures de sûreté destinées à protéger la société sont abandonnées. C’est le cas, hors de notre domaine, du traitement obligatoire des maladies vénériennes. C’est le cas également, et de façon très symbolique, du régime de placement des alcooliques dangereux abrogé sans autre explication qu’une prétendue désuétude. Même la fameuse loi du 31 décembre 1970 est abrogée pour être re-codifiée sans modification notable. L’enveloppe a changé mais la lettre ne suit pas et la contradiction s’exprime entre préoccupations de santé publique dans l’intérêt de la société qui subsistent dans les textes et préoccupations de santé publique dans l’intérêt de l’individu qui s’annoncent dans le plan.

 

 

 

29. Ces contradictions entre assistance aux usagers et prohibition de principe se retrouvent au quotidien. L’information objective sur les drogues, la délivrance de seringues, le « testing » ou les salles d’injections constituent des infractions, aide à l’usage (art. 222-37 C. pén.), provocation ou présentation sous un jour favorable (art. L.3461-4 C. santé publ.), qu’un fait justificatif plus ou moins précis vient excuser. Plus fondamentalement encore, la réduction des risques rend moins légitime la prohibition. Comment justifier, par exemple, les sanctions prises à l’encontre d’un médecin qui délivre des stupéfiants à un toxicomane en sachant que ce dernier va s'adonner à l'usage de la drogue[49] quand, dans le même temps, ce médecin est invité à prescrire de la buprénorphine ou de la méthadone dans le cadre des programmes de substitution ? Comment concilier la politique d’accès aux seringues stériles et la répression de l’usage de stupéfiants quand, de façon évidente, la possession d’une seringue est un indice laissant présumer la commission d’une infraction d’usage ou de détention de stupéfiants ?

 

 

 

30. Sur ces aspects, le plan triennal de lutte contre la drogue et le nouveau code de la santé publique restent insuffisants. S’agissant des seringues, le plan affirme que leur possession ne peut suffire à fonder une procédure judiciaire contre un usager. Mais cette suggestion suscite des réticences compréhensibles chez les fonctionnaires chargés de l’appliquer. La circulaire du ministère de la justice[50] destinée à mettre le plan en application reprend bien le principe de l’absence de poursuites en cas de détention de seringues, mais la circulaire du ministère de l’Intérieur reste muette sur le sujet[51]. Comment en effet demander à un agent qui a l’obligation statutaire de faire cesser les infractions de fermer les yeux sur les indices qui laissent présumer la commission répétée d’une de ces infractions ? De telles contradictions fragilisent les deux logiques, prohibitionnistes et de réduction des risques. Les intervenants du secteur sanitaire et social ont le sentiment d’agir dans un contexte très précaire et les organes de répression ne savent plus quelle attitude adopter face à l’usage de stupéfiants ou à certains actes de provocation[52].

 

 

 

Conclusion : le retour de l’irrationnel

 

 

 

31. L’apparition du SIDA a montré les limites de l’ordre public sanitaire. Les gouvernements ont soudain réalisé qu’imposer des contraintes de soin pouvait nuire à la société au lieu de la protéger en faisant passer dans la clandestinité certains citoyens. On admet de plus en plus mal qu’une personne puisse être contrainte de se soigner et on croit de moins en moins qu’une telle contrainte soit efficace. Mais la disparition de l’ordre public sanitaire crée un vide. La crainte sociale qui naît de l’usage de drogues subsiste et, pour y répondre, on voit s’affirmer des politiques où l’ordre public général remplace l’ordre public sanitaire. L’usage de drogues est un fait que la société reconnaît mais, ce faisant, elle impose des contraintes nouvelles aux usagers pour protéger les tiers. Ce mouvement est très perceptible aux Pays-Bas. La politique de tolérance vis-à-vis de l’usage et de la vente au détail du cannabis s’accompagne de contraintes sévères – la loi « Damocles » - pour protéger l’ordre public. En France, avec une dizaine d’années de retard, le même processus se met en œuvre, non sans excès.

 

 

 

 

 

32. Si tout le monde s’accorde pour considérer que la tolérance à l’égard de l’usage de drogues ne peut porter préjudice aux tiers, la dangerosité sociale de ces conduites est de nouveau surestimée. On se souvient, l’année dernière, de l’amendement Mariani visant à pénaliser les « free parties ». Le résultat a été l’adoption d’une infraction dont l’élément légal frise le ridicule[53]. Pris entre sa volonté de contrôler ces soirées et le souci de ne pas imposer les mêmes contraintes à toutes les noces, banquets et autres anniversaires de France, le Parlement a fini par soumettre à une obligation de déclaration les seuls « rassemblements exclusivement festifs à caractère musical » (sic). Les noces d’or de la tante, le mariage de la cousine et l’anniversaire du petit frère commémorent un événement tandis que les free parties seraient destinées à s’amuser sans raison valable… Si la légalité a encore un sens, on se demande comment les poursuites peuvent être possibles. Que la free partie soit destinée à fêter l’anniversaire de tel ou tel participant ou à commémorer tel ou tel événement et elle n’a plus ce caractère « exclusivement festif » qui permet d’engager des poursuites. Loi « totem » donc plutôt que loi substantielle, ce texte marque un retour à une gestion symbolique de la lutte contre la drogue. L’adoption programmée d’une nouvelle infraction d’usage de stupéfiants au volant exprime mieux encore cette gouvernance par l’irrationnel ainsi que le passage de l’ordre public sanitaire à l’ordre public général.

 

 

 

33. La répression du cannabis au volant est la grande affaire de cet automne. L’histoire bégaie avec la création de cette infraction où l’amalgame le dispute au sensationnel. On croit retrouver les égarements de la géographie de la santé ou plus récemment de la « théorie de l’escalade ». À écouter nos parlementaires il y aurait urgence à légiférer. Le cannabis et les autres stupéfiants seraient la cause d’un quart des accidents mortels, selon le rapporteur de la commission des lois, 5 à 20% selon un autre député, 15% selon un troisième. D’après un quatrième, 12 à 17 % des conducteurs sont sous l'emprise du cannabis au moment de l'accident, plus de 20 % chez les moins de 27 ans. Le ministre de la justice ajoute encore que le risque d’accident est alors multiplié par 2,5. Comme si cela ne suffisait pas on en appelle au fait divers - comme pour toutes les grandes lois en matière de stupéfiants - et à la dramatique histoire de Marilou, « petite fille de neuf ans tuée par un chauffard sous l'emprise du cannabis ».

 

 

 

34. Ces chiffres ont tous une même origine, les conclusions de « plusieurs experts judiciaires » pour reprendre l’expression du ministre de la Justice. En restant courtois on dira que ces « experts judiciaires » récemment nommés[54] ont une foi sans limite dans le potentiel de leur discipline.[55]. MM. Kintz et Mura sont les président et vice-président de la société française de toxicologie analytique (anciennement médecine légale) dont l’objet est la promotion du dépistage des drogues[56], dépistage assuré par ces mêmes « experts judiciaires ». Ils sont membres du comité de rédaction des annales de toxicologie analytique, ex toxicorama souvent cité durant la procédure législative[57]. Ils publient avec constance dans cette revue depuis 1993 des articles censés démontrer le danger du cannabis au volant. Ils animent encore le site internet de l’association Marilou[58] et considèrent que les dangers du cannabis sont bien plus importants que ceux de l’alcool et du vin en particulier. Ils s’étaient déjà manifestés avec le Pr Nahas au moment de la publication du rapport Roques pour s’indigner de voir mis sur le même plan l’alcool et les stupéfiants[59]. Ces « experts judiciaires » font feux de tous bois pour promouvoir leur discipline. Ils prouvent que Napoléon a été empoisonné à l’arsenic[60], se félicitent de la reprise médiatique de leurs interventions[61] en matière de dopage et pratiquent avec constance l’auto-légitimation[62].

 

 

 

 

35. Pourtant, les études nombreuses publiées depuis 1973 aboutissent à des conclusions bien différents de celles dont font état MM. Mura et Kintz[63]. Le néophyte peut les résumer ainsi :

 

1° La prévalence du cannabis au volant augmente, au même titre que l’usage du cannabis en général ;

 

2° Le cannabis a une incidence limitée sur la capacité à conduire. Seules des doses élevées (300 mg/kg) sont susceptibles de modifier le comportement des usagers[64].

 

3° Le principal danger réside dans les difficultés éprouvées par les usagers pour maintenir la trajectoire de leur véhicule.

 

4° L’association cannabis-alcool , accroît les risques d’incapacité de conduire[65].

 

5°Les usagers de cannabis sous-estiment leur capacité à conduire tandis que les usagers d’alcool la surestiment[66]. Alors que l’alcool donne aux conducteurs le sentiment de maîtriser leur conduite, les usagers de cannabis se sentent moins maîtres de leur véhicule qu’ils ne le sont en vérité et sont donc enclin à faire plus attention.

 

6° La majorité des usagers de cannabis s’interdisent de conduire après avoir consommé de la drogue, à la différence des usagers d’alcool[67].

 

 

 

36. En clair, et n’en déplaise à ces « experts judiciaires » en croisade, le cannabis est moins dangereux pour la sécurité routière que l’alcool[68]. Ces effets sur la conduite sont moins sensibles et les fumeurs de joints font beaucoup plus attention que les buveurs de vin[69]. Même MM. Kintz et Mura sont parfois obligés de le reconnaître. Ainsi, la fameuse étude censée démontrer les dangers du cannabis aboutit à un risque d’accident multiplié par deux pour le cannabis … mais par 9 pour l’alcool et 25 lorsque les deux substances sont consommées en même temps[70]. Dans un article sur les tests de dépistage présenté devant le groupe Pompidou, Le Dr Kintz reconnaît d’ailleurs « qu'il est impossible de fixer un seuil définitif de concentration au-delà duquel la vigilance est modifiée »[71]. Quant au Dr Mura il co-signe l’expertise collective de l’INSERM sur le cannabis qui affirme que « le substrat scientifique [des actions de sécurité routière] dans le cas du cannabis semble encore fragile »[72], que le risque de dépendance au cannabis est le plus faible de toutes les substances psychoactives testées (40% des usagers contre 87% pour le tabac, p. 332), qu’une « détection positive de cannabinoïdes n’a pas une signification univoque en termes de sécurité routière » (p. 343), ou que « l’existence d’un lien causal entre usage du cannabis et accidents de la circulation ne peut être démontrée » (p. 345).

 

 

 

37. Finalement, le principal enseignement de ces travaux est le faible intérêt des études toxicologiques. La toxicologie analytique dont MM. Kintz et Mura se font les hérauts se heurte au fait que le cannabis peut être détecté plusieurs semaines après la consommation tandis que l’alcool ne l’est plus après quelques heures[73]. Comparer les résultats des tests de dépistage à l’alcool et au cannabis est donc un non-sens. On compare en effet d’un côté trois semaines de consommation et de l’autre une douzaine d’heures. Pour que la comparaison soit pertinente, il faudrait rechercher la consommation de cannabis et d’alcool dans les trois semaines qui précédent l’accident. Sans être un spécialiste de la toxicologie analytique, je suis prêt à affirmer qu’une telle étude, si elle était possible, permettrait d’affirmer que si 15% des conducteurs impliqués dans un accident de la circulation ont consommé du cannabis dans les trois semaines précédent l’accident, 90% au moins ont consommé de l’alcool… Cela ne nous dira pas pour autant que leur consommation a eu un lien causal avec l’accident[74], et c’est là la limite majeure des tests de dépistage : ils ne permettent pas de savoir si la consommation de stupéfiant a eu des conséquences sur la conduite automobile au moment de l’accident. Comme le reconnaît le Dr kintz dans un rapport remis à l’Union européenne dans le cadre du projet ROSITA (roadside testing assessment): « As the window of detection of cannabis is long in urine, several days after the last exposure, this biological specimen is not suitable to demonstrate direct influence of the drug at the moment of the accident. »[75]. Quant au Dr Mura il écrit dans une communication récente : « En raison de tous ces éléments, il paraît illusoire de vouloir déterminer un seuil sanguin de dangerosité au volant »[76]. En clair, la détection positive au cannabis n’a pas de sens en termes de sécurité routière, même pour les plus chauds partisans de la répression. Une constatation qui amoindrit considérablement l’intérêt des dépistages que ces « experts judiciaires » espèrent pourtant généraliser.

 

 

 

38. Pour autant, le cannabis crée un risque au volant, comme tous les produits psychotropes, alcool, tabac ou médicaments. Il est parfaitement légitime de se prémunir contre ce risque, mais la nouvelle incrimination ne s’imposait pas. L’usage de stupéfiants est déjà puni en toutes circonstances (art. L.3421-1 C. santé pub.) et les tribunaux n’hésitent pas à sanctionner les éventuels conducteurs intoxiqués pour mise en danger délibérée de la vie d’autrui lorsque l’ivresse est prouvée. Le Préfet peut encore retirer son permis de conduire à toute personne présentant des troubles du comportement liés à l’usage de stupéfiants[77]. La nouvelle incrimination n’apporte donc rien en termes de sécurité routière. En revanche, elle supprime l’alternative sanitaire lorsque l’usager est contrôlé sur la route. Même si sa consommation remonte à plusieurs semaines, même si elle n’a aucune influence sur sa capacité à conduire, il ne pourra plus bénéficier de la procédure d’injonction thérapeutique et la peine encourue sera doublée. Il est tout de même surprenant que l’on en arrive ainsi à punir les mêmes faits différemment selon le lieu où l’infraction est constatée. Ce n’est plus l’acte criminel qui détermine la qualification pénale, c’est l’activité de la police.

 

 

 

39. Je n’aurais pas prêté autant d’attention à ces études si elles n’avaient pas des conséquences si graves. La première est le discrédit qu’elles jettent sur les expertises judiciaires. Tant d’excès dans l’interprétation des données scientifiques oblige à se poser la question de l’impartialité et de l’objectivité des expertises réalisées par les membres de l’Association française de toxicologie analytique dans le cadre des procédures judiciaires. Certains tribunaux, plus rationnels que notre ministre de la Justice, renoncent d’ailleurs à suivre les conclusions trop partiales de ces « experts »[78].

 

 

 

40. Plus grave encore, sous le fallacieux prétexte d’améliorer la sécurité routière, ces experts ont obtenus ce qu’ils voulaient : pénaliser sans alternative thérapeutique l’usage du cannabis et mettre la loi au niveau de leurs compétences. Puisqu’ils ne peuvent déterminer une causalité entre usage de drogue et accidents de la circulation et bien nous nous passerons de causalité. Cela ne facilitera pas pour autant les poursuites. Les tests donnent des faux positifs au cannabis et leur interprétation est sujette à caution. Les prétoires seront l'occasion de querelles d'experts pour savoir si le dépistage permet bien d'affirmer avec certitude que le produit stupéfiant avait bien un caractère illicite (un obstacle majeur pour les opiacés qui peuvent être consommés dans le cadre d'un traitement médical).

 

 

 

41. Enfin,et c’est la conséquence la plus regrettable de ces manœuvres, le discours de ces experts réduit à néant tout les espoirs que l’on pouvait fonder dans la prévention de ces comportements dangereux. Un des principaux apports des études sur le cannabis au volant est de montrer qu’il y a une conscience des dangers du cannabis pour la conduite automobile chez les usagers. Alors qu’il faut se battre chaque jour pour faire admettre qu’un taux de 0,5g d’alcool peut affecter la capacité à conduire, les usagers de cannabis admettent, et même sur-estiment, les dangers de leur consommation. Dans le même temps cet acquis est précaire s’agissant de régulations clandestines construites hors du droit positif dans une population qui se développe. Un travail d’information et de prévention pouvait facilement être mis en place sur une base aussi favorable pour affirmer et pérenniser cet acquis. Aujourd’hui une telle action est vouée à l’échec puisque la loi ne fait pas du danger de l’usage sur la route un critère de la répression.

 

 

 

42. Finalement, la drogue apparaît une fois encore comme l’instrument de politiques ou d’intérêts particuliers qui ne se préoccupent pas de la santé des individus. Il s’agit maintenant de rassurer les citoyens, d’offrir un déboucher commercial à certains toxiques ou une notoriété inespérée à certains « experts » comme il s’agissait hier d’abonder les finances coloniales ou de lutter contre une prétendue dégénérescence de la race.

L’ordre public général se substitue à l’ordre public sanitaire au risque de rendre encore plus confuse la politique française de lutte contre les drogues sans permettre pour autant de réduire l’usage de drogue et ses dangers.

 

 

 

Sources Bibliographiques:

 

[1] Bernard ROQUES, Rapport au Secrétaire d’État à la santé, la dangerosité des drogues, éd. O. Jacob - La doc. Fr., 1999.

 

[2] René STOURM, Systèmes généraux d'impôts, Paris, 3ème éd., Lib. Félix Alcan, 1912, p.38 et 39.

 

[3] Th. LARCHEVÊQUE, Droit français du monopole des tabacs, thèse, Paris, 1887, Lib. nouvelle de droit et de jurisprudence, Arthur Rousseau éd., p. 121.

 

[4] Q. n°35756 de M. Maujouan du Gasset, JOAN, 15 déc. 1980, p. 5286.

 

[5] Rép. min. à Q. n°27928 de M. Mariani, JOAN, 6 nov. 1995, p. 4693.

 

[6] L. Com-Ruelle, S. Dumesnil, L’hospitalisation des patients alcooliques, in C. Got et J. Weill, L’alcool à chiffres ouverts, Paris, 1997.

 

[7] Louis Lunier, “ De la production et de la consommation des boissons alcooliques en France et de leur influence sur la santé physique et intellectuelle des populations ”, La Tempérance, Paris, 1877.

 

[8] D. Nourrisson, Géographie d’une pandémine : l’alcoolisme, https://xxi.ac-reims.fr/fig-st-die/actes/actes_2000/nourisson/article.htm

 

[9] Art. 49-1-2, anc. C. déb. Boiss. (art. 10, IX, L. 10 janv. 1991, JO, 12 janv., p.6215).

 

[10] D. n° 92-880, 26 août 1992, JO, 1er sept., p. 11939.

 

[11] L. n°93-1282, 6 déc. 1993, JO, 7 déc., p. 16974.

 

[12] D. n°96-704, 8 août 1996, JO, 10 août, p. 12181.

 

[13] CE, 30 nov. 1998, Rec., p. 449.

 

[14] Art. 21, L. fin. Rect. N°98-1227, JO 31 déc., p. 20116.

 

[15] Loi n°2000-1352, 30 déc. 2000, JO, 31 déc., p. 21119 et décret n°2001-1070, 12 nov. 2001, JO 17 nov., p. 18343.

 

[16] JOAN, 20 oct. 2000, 2éme séance, p. 7220.

 

[17] Rapport de l’Organe International de Contrôle des Stupéfiants pour 1997, E/INCB/1997/1, §374 et 376 ; rapport pour 1998, E/INCB/1998/1, §430.

 

[18] La concentration en THC doit être inférieure à 0,2% depuis le début de l’année (Règl. Conseil, n°1420/98, 26 juin 1998 (JOCE, L190, 4 juill., p. 7).

 

[19] CEDH, Asociacion Ramon de Estudio sobre el Cannabis (ARSEC) c. Espagne, 42946/98, 15 juin 1999 ; Marlow c. Royaume-Uni, 00042015/98, 5 déc. 2000.

 

[20] Commission Européenne, DGXV, Single Market News, n°24, déc. 2000, Entraves au commerce en Grèce, Le nom du chanvre et le prix des médicaments.

 

[21] Poursuites contre The Body Shop pour une crème contre la peau sèche à base de chanvre dont l’étiquette représentait une feuille de chanvre (Libération, 2 sept. 1998, p. 1 et 40) ; à propos des boissons à base de chanvre, « chanvrette » ou « cannab’fizz » (Le Monde, 30 mars 2000, p. 26) ; à propos d’une perquisition au dernier Salon de l’agriculture, (Libération, 9 mars 2001).

 

[22] CJCE, concl. Av. Gén., Affaire C462/1, 8 oct. 2002, Ulf Hammarsten.

 

[23] CJCE, Coffeeshop Siberïe, n°C158/98, 29 juin 1999, Rec. p. 3988.

 

[24] Arr. 7 févr. 1899, JO Indo. Fr., 23 févr. 1899, p. 135 et s.

 

[25] En Tunisie, les Douanes éprouvent la même fierté pour le monopole des tabacs et du cannabis comme en témoigne le titre de l’opuscule publié en 1931 par la Direction générale des finances de la Régence de Tunis sur l’œuvre financière du protectorat qui présente la création de la caisse de retraite pour les fonctionnaires tunisiens et le monopole du tabac et du cannabis (Oeuvre financière du Protectorat Français en Tunisie, Régimes douaniers et produits monopolisés, société de prévoyance des fonctionnaires et employés tunisiens, sociétés indigènes de prévoyance, Tunis, Bourg, imp. victor Berthod).

 

[26]La ferme de l'opium est créée par un arrêté du 4 octobre 1877 modifié en 1882 (arr. 10 août 1882, BO Ets fr. de l'Océanie, août 1882, p. 256, n°294).

 

[27] Le monopole du tabac et du kif est exploité par la Régie co-intéressée des tabacs au Maroc, société contrôlée par la Banque de Paris et des Pays-Bas dès 1914 (Archives de l'étude Airault, Dousset, Lejeune, notaires à Paris, n°23213).

 

[28]Ce monopole est instauré dès 1881, RÉGENCE de TUNIS, Direction générale des finances et Direction de l'agriculture et du commerce, La culture du tabac en Tunisie - Notice à l'usage des planteurs, annexe A, Tunis, Imp. française B. Borrel, 1899, p. 39 et 40.

 

[29] Convention entre la France et l’Angleterre du 31 août 1787, G.-F. de MARTENS, Rec. des traités, tome 3, p. 72 et, tome 7, p. 106 ; voir aussi G.-F. de MARTENS, Rec. des traités 2° série, tome 4, p. 280 pour les reconductions successives de cette convention.

 

[30] En 1913 un auteur prend la défense du monopole en ces termes : « Le monopole de l'opium […] réunit tous les caractères théoriques du monopole parfait; il est supporté par les assujettis, il est d'un bon rapport, un certain souci d'hygiène confère à la régie une allure moralisatrice qui lui sied. Il semble donc qu'il faudrait maintenir en l'état un système aussi satisfaisant » (Bernard-Marcel PEYROUTON, Les monopoles en Indochine, Thèse, Paris, Emile Larose éd., 1913, p. 219).

 

[31] Peter D. LOWES, The genesis of international narcotics control, Genève, coll. Travaux de Droit, d'économie, de sociologie et de sciences politiques n°46, Librairie Droz, 1966, p.134

 

[32] Conseil de Gouvernement de l'Indochine, session ordinaire de 1918, procès-verbal de la séance du 21 décembre 1918, JO Indo. Fr., p. 1541 et 1542

 

[33] MERCIER L. (traducteur), Une opinion marocaine sur le monopole du tabac et du kif, Archives marocaines, IV, n° 1, 1905, p. 152 et s.

 

[34] Georges THIBOUT, rappelle ainsi un des commandements de Bouddha « vous ne boirez pas de liqueurs intoxicantes », in, La question de l'opium à l'époque contemporaine, Steinheil éd., Paris, 1912, p. 322

 

[35] La première prohibition de l’opium résulte d’une Instruction du 23 juin 1830, Collectanea constitutionum…Sanctae Sedis ad usum operariorum apostolicorum societatis Missionum ad exteros.Parisiis, Georges Chamerot, 1880, p. 634-635

 

[36] Instructio ad Vicarios apostolicos in imperio Sinarum et finitimis regnis atque provinciis circa Opium, Acta sanctae sedis in compendium opportune redacta et illustrata, typis polyglottae officinae S.C. de Propaganda Fide, vol. XXIV, 1891-1892, p. 50.

 

[37] Dans la mesure toutefois où ces usagers « font tous leurs efforts dans la mesure de leurs forces pour se corriger » S.C.S. Officii 27 Martii 1878 - Dubia quoad usum opii, Acta sanctae sedis in compendium opportune redacta et illustrata, tome XXIX, 1897, p. 387.

 

[38] Voici en quels termes le Pasteur VIÉNOT s’exprimait dès 1890 : « Si l'on a pu dire avec raison que l'alcool était un poison, que ne peut-on pas mettre sur le compte de l'opium au point de vue moral comme au point de vue physique? “L'opium, dit Larousse, qui n'a jamais passé pour un moraliste, l'opium atrophie les qualités mentales, abrutit l'intellect et développe chez l'homme toutes les horribles passions de la brute” il faut donc, coûte que coûte, en empêcher la consommation par la population de la colonie; il faut la préserver d'un fléau qui, sûrement, la conduirait graduellement au tombeau » (Procès-verbaux des séances du conseil général des Ets français de l'Océanie, année 1889-1890, Papeete, imp. du gouvernement, p. 219).

 

[39] Mgr Brent adresse cette année-là une lettre au Président Roosevelt dans laquelle il écrit: « Recently, as of course you are aware, the question of England’s share in the opium traffic has been reopened in official circles in the old country. My experience on the Philippine opium investigating committee leads me to believe that the problem is of sufficient merit to warrant an endeavour to secure international action. From earliest days of our diplomatic relations with the East the course of the United States of America has been so manifestly high in relation to the traffic in opium that it seems to me almost our duty, now that we have the responsability of actually handling the matter in our possessions, to promote some movement that would gather in its embrace representatives from all countries where the traffic in and use of opium is a matter of moment » (US House, Doc. n°380, p. 246).

 

[40] Thiers, De la propriété, 1848.

 

[41] B.J. LOGRE, Les toxicomanes, Paris, Stock, 1924, p. 89.

 

[42] L. 16 mars 1915, JO, 17 mars 1915, p. 1407.

 

[43] Proposition de loi tendant à réprimer l’usage et la détention de la cocaïne présentée par M. Louis MARTIN, JOS Doc. Parl., séance du 17 juin 1915, annexe 207, p. 103.

 

[44] L. 15 avril 1954, JO, 21 avril, p. 3827.

 

[45] Rapport supplémentaire Mazeaud n°1330, JO Doc. Parl., Ass. Nat., 26 juin 1970.

 

[46] Avis Marcilhacy n°35, JO Doc. Parl., Sénat, 27 oct. 1970 et JOS Déb., 3 nov. 1970, p. 1715: « Ce qui dans un cadre étroit peut être toléré par une civilisation devient intolérable quand le mal se répand. C'est là je crois, que ces mesures attentatoires à une certaine liberté individuelle trouvent leur justification profonde…Celui qui se détruit le fait dans un contexte social tel que son acte est aussi pernicieux pour la santé publique qu'une maladie contagieuse ». Dans le même sens, OICS, rapport pour 1999, E/INCB/1999/1, §176, p. 29.

 

[47] Le Monde, 18 mars 1997, p. 5.

 

[48] Ord. n°2000-548, 15 juin 2000, JO, 22 juin, p. 9337 et numéro spécial du même jour.

 

[49] Cass. crim. 6 décembre 1983, D., 1985, IR, 464, note Penneau.

 

[50] Circ. NOR JUSA9900148 C, 17 juin 1999.

 

[51] Circ. NOR INTC9900206 C, 11 oct. 1999. Sur les contradictions de ces deux textes, F. CABALLERO et Y. BISIOU, Droit de la drogue, précis Dalloz, 2ème éd., 2000, § 461, p.565.

 

[52] À Montpellier, le responsable de l’antenne locale de l’association « techno plus » a été interpellé et placé en garde-à-vue pour avoir diffusé des plaquettes d’information considérées comme une provocation à l’usage de stupéfiants. Les poursuites ont été abandonnées lorsque les autorités judiciaires ont découvert que lesdites plaquettes étaient financées par le Ministère de la santé dans le cadre de la réduction des risques. Plus récemment, à propos d’une perquisition dans un centre d’accueil pour toxicomanes, Libération, 3 août 2000, p. 13.

 

[53] Art. 23-1 de la loi n°95-73 du 21 janv. 1995, mod. loi no 2001-1062 du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne, JO, 16 nov., p. 18215.

 

[54] Déc. 8 nov. 2000, JO, 3 déc.

 

[55] Nous rappellerons ici que le dépistage des stupéfiants est rémunéré (art. L.235-1 et R.235-12 du Code de la route). Une indemnisation bien supérieure à celle octroyée pour le dépistage de l’alcool pour tenir compte, semble-t-il de la diversité des tests à réaliser. La simple recherche des stupéfiants dans les urines qui dure une ou deux minutes est à l’indice B150 trois fois plus que la somme prévue pour la recherche et le dosage de l’alcool dans le sang. Quant au recours à la chromatographie en phase gazeuse, elle est à l’indice GC/SM B800 ou 900 quand la même recherche pour l’alcool n’est qu’à l’indice B120, moins que pour un simple test urinaire de dépistage des stupéfiants (art. R.117 C. proc. Pén.).

 

[56] https://www.sfta.org/presentation/presentation.htm

 

[57] JO AN doc parl., Rapport Delmatte, 29 nov. 2000.

 

 

[58] https://www.association-marilou.org/cannabis_au_volant/chiffres.php

 

[59] On s’étonnera moins alors que ces « experts judiciaires » programment une visite du « musée du vin » lorsqu’ils organisent le congrès de leur société savante (https://www.tiaft.org/tiaft2002/index.html).

 

[60] Kintz, une nouvelle série d’analyses des cheveux de Napoléon confirme une exposition chronique à l’arsenic, ATA, vol. XIII, n°4, 2001.

 

[61] « cette presse peut être également utile à l'expert pour asseoir sa notoriété ou favoriser sa promotion. La SFTA s'est faite connaître par sa profonde opposition au rapport Roques sur la dangerosité des drogues ou son intransigeance face à la dépénalisation-décriminalisation du cannabis. … Informer le public, lui donner envie de lire ce journal plutôt qu'un autre, interpréter un fait avec une dimension politique, ou faire parler de soi et assurer la promotion de son laboratoire, publier le cas dans un journal scientifique avant le jugement (qui peut être retardé, surtout s'il y a Appel en Assises), voilà le délicat mixage entre expertise et média», P. Kintz, Expertises et média : la vérité n'appartient pas qu'aux journalistes contribution présentée au Xème congrés annuel de la SFTA, 19 et 21 uin 2002 ( www.cccta.unige.ch/martigny/docs/112.doc)

 

[62] pour un exemple récent, P. Mura, Cannabis sativa var. indica : une menace croissante pour les entreprises, Annales de toxicologie analytique, n°1, vol. XIV, 2002.

 

[63] Une bibliographie détaillée peut être consultée à l’adresse suivante : https://www.ukcia.org/research/medline/8.htm

 

[64] U.S. Department of Transportation, National Highway Traffic Safety Administration, Marijuana and actual driving performance, (DOT HS 808 078), Final Report, Nov. 1993. Plus nuancé, U.S. Department of Transportation, National Traffic Safety Administration, DOT HS 808 939, Marijuana, Alcohol and Actual Driving Performance Juill. 1999. Cette étude précise que les effets peuvent dépendre également de l’habitude de consommer la drogue, un usagers occasionnel réagissant à des doses moins élevées qu’un usager habituel.

 

[65] Gjerde H, Kinn G, Impairment in drivers due to cannabis in combination with other drugs, Forensic Science International,1991, 50(1), p. 57-60. Plus nuancé, Canadian Government Commission of Inquiry into the Non-Medical Use of Drugs, published by Information Canada, Ottawa, Canada, 1972, Crown.

 

[66] Robbe, H.W.J. (1994), Influence of marijuana on driving. Maastricht: Institute of Human Psychopharmacology, University of Limburg ; Robbe, Hindrik W.J. (1997), Cannabis and car driving. In: Lorenz Böllinger (1997) Cannabis science / Cannabis Wissenschaft. From prohibition to human right / Von der Prohibition zum Recht auf Genuß. Frankfurt am Main: Peter Lang Europäischer Verlag der Wissenschaften. Voir également en France, Esterle-Hedibel, questions pénales, juin99-XII.3, Ministère de la Justice – CESDIP qui note que les usagers interviewés déclarent que le cannabis affecte leur capacité à conduire.

 

[67] P. Cohen & A. Sag, Cannabis use in Amsterdam, CEDRO, Univ. Of Amsterdam, 1998.

 

[68]The NHTSA report, "The Incidence and Role of Drugs in Fatally Injured Drivers," by K.W. Terhune, et al. of the Calspan Corp. Accident Research Group in Buffalo, NY, 1992 ; U.S. Department of Transportation, National Traffic Safety Administration, DOT HS 808 939, Marijuana, Alcohol and Actual Driving Performance Juill. 1999 ; Tunbridge, R., Clarke, A., Ward, N., Dye, L., & Berghaus, G. (2000). Prioritising drugs and medicines for development of roadside impairment testing. Project Deliverable DR1, CERTIFIED EU Research Project (Contract No RO-98-RS.3054), School of Psychology, University of Leeds (https://www.psyc.leeds.ac.uk/certified/deliverables/DR1_final.doc). Cette étude précise que le risque routier induit par l’usage du cannabis a probablement était sur-estimé en raison, notamment d’associations entre cannabis et alcool. Pour une des études les plus récentes, B F Sexton, R J Tunbridge, N Brook-Carter, P G Jackson, K Wright, M M Stark, K Englehart, The Influence of Cannabis on Driving, UK Government, Department for Transport, déc. 2000.

 

 

 

[69] Pour une des premières études en ce sens, Mason AP, McBay AJ, Ethanol, marijuana, and other drug use in 600 drivers killed in single-vehicle crashes in North Carolina, 1978-1981, Journal of Forensic Sciences,1984, 29(4), p. 987-1026 : « Ethanol was the only drug tested for that appears to have a significantly adverse effect on driving safety ».

 

[70] Françoise Vincent, Claude-Elisabeth Barjhoux, Philippe Saviuc, Nicole Jourdil, Hélène Eysseric, Janine Bessard, Michel Mallaret, Germain Bessard, Patrick Mura, Prévalence de substances psychoactives chez les conducteurs de la région grenobloise impliqués dans un accident non mortel de la circulation routière ; comparaison de données cliniques et biologiques, communication aux Xème congrés annuel de la SFTA, 19 et 21 uin 2002 ( www.cccta.unige.ch/martigny/docs/211.doc).

 

[71] P. Kintz, Place de la salive et de la sueur dans la caractérisation d'une conduite automobile sous influence, https://www.pompidou.coe.int/route/route_fr277.html

 

[72] Inserm, expertise collective, cannabis - Quels effets sur le comportement et la santé, oct. 2001, p. 346.

 

[73] Dackis CA, Pottash AL, Annitto W, Gold MS, Persistence of urinary marijuana levels after supervised abstinence, American Journal of Psychiatry,1982,139(9), p. 1196-8 ; Inserm, préc., p. 341.

 

[74] Marquet P, Delpla PA, Kerguelen S, Bremond J, Facy F, Garnier M, Guery B, Lhermitte M, Mathe D, Pelissier AL, Renaudeau C, Vest P, Seguela JP, Prevalence of drugs of abuse in urine of drivers involved in road accidents in France: a collaborative study, 1998, 0022-1198, J Forensic Sci, p. 806-11

 

[75] P. Kintz, V. Cirimele, Evaluation of different roadside drugs tests, ROSITA, Contract DG VII RO 98-SC.3032

 

[76] Patrick Mura, Yves Papet , Nadège Baritault, Cannabis et conduite automobile : une valeur sanguine limite est-elle nécessaire ? journalistes contribution présentée au Xème congrés annuel de la SFTA, 19 et 21 uin 2002 ( www.cccta.unige.ch/martigny/docs/211.doc)

 

[77] Art. R.221-14 Nouv. C. route, et Arr. 7 mai 1997.

 

[78] TGI Colmar, 4 oct. 2001, M…, inédit. Pour justifier une qualification de mise en danger délibérée d’autrui, M. Kintz n’avait pas hésité à affirmer qu’un taux de cannabis de 3,7 nanogrammes/l signifiait que la personne – qui avait consommé du cannabis une vingtaine de jours avant l’accident, était soumises aux effets de la drogue.

 

Source:pages perso de Yann Bisiou

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Très bon article, Mr Polo, j'ai adoré !

 

Très bonne conclusion !

 

En revanche, par rapport à la conclusion, il y a quelque chose que je n'ai toujours pas compris : à qui peut bien servir cette prohibition ?

 

++

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En revanche' date=' par rapport à la conclusion, il y a quelque chose que je n'ai toujours pas compris : à qui peut bien servir cette prohibition ?

 

[/quote']

 

la prohibition aux usa a couté en 80 ans. plus de 300 milliards de dollars.....voit a qui revient ce fric..societé de surveillance, flic, juge, avocat,etc...

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Hello...

 

je suis content que cela aie plu à certains :-)

après le temps passé sur la mise en page ;)

Le Montpeliérain Yann Bisiou est coauteur avec Francis Caballero de la seconde édition du Précis DALLOZ "Le Droit de la Drogue"

et c'est en faisant une recherche sur ce monsieur que j'ai trouvé sa page perso fort sympatoche... c'est bien écrit et très référencé, que du bonheur pour moi :-(

 

a++

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la prohibition aux usa a couté en 80 ans. plus de 300 milliards de dollars.....voit a qui revient ce fric..société de surveillance, flic, juge, avocat,etc...

 

d'après un documentaire que j'ai vue resement au us cela se compterai plus en billions de $ que milliard ...

 

 

et bravo mrpolo pour ton post :)

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Hello

Nouvel article de Mr Yann Bisiou

 

 

Dépistage des stupéfiants au volant

punir sans soigner

Entre sécurité publique et sécurité routière, l’usage de stupéfiants est au cœur des préoccupations des pouvoirs publics. Symboliquement une nouvelle infraction de conduite après avoir fait usage de stupéfiants a été adoptée le 3 février 2003 (art. L.235-1 C. route). C’est cette loi que j’entends évoquer devant vous. Mais présenter cette infraction ce n’est pas seulement commenter la loi du 3 février 2003. C’est aussi évoquer l’arrêté du 15 juillet 2002 relatif au coût du dépistage, le décret du 31 mars 2003 pris en application de la loi du 3 février et même discuter la loi du 12 juin 2003, qui abroge en partie cette loi du 3 février!

 

Si on ajoute à ces textes la recodification de la partie réglementaire du code de la santé publique par le décret du 31 mai 2003, le projet de loi relatif à la politique de santé publique présenté en Conseil des ministres le 21 mai 2003 et le très polémique rapport « Drogue l’autre cancer » de la très partiale commission d’enquête sénatoriale sur les politiques nationales de lutte contre les drogues illicites, on comprendra que le droit de la drogue est en pleine mutation. Une mutation désordonnée qui abandonne l’idée d’un traitement des usagers de drogue pour se concentrer sur un objectif à court terme de sécurité publique. Parviendra-t-on à limiter l’abus de drogue et à renforcer la sécurité publique grâce à ces nouveaux textes ? On peut en douter.

 

L’infraction de conduite après usage de stupéfiants illustre parfaitement les limites et les dangers d’une loi plus symbolique qu’efficace qui repose exclusivement sur un outil technique : le dépistage.

 

Il n’est pas envisageable de présenter l’ensemble du dispositif juridique dans le cadre de cette conférence ; je vous renvoie pour cela vers mon site Internet. Je limiterai mon propos à cette question du dépistage. La nouvelle infraction s’appuie sur la recherche discrétionnaire d’une dangerosité présumée (1). Or l’efficacité réelle du dépistage dans le cadre de la procédure pénale n’est pas certaine (2). Malgré ces réserves, le législateur déduit d’un contrôle positif des sanctions d’une grande sévérité sans aucune alternative thérapeutique (3).

 

1. Le dépistage d’une dangerosité présumée et non prouvée

 

L’article L. 235-1 du Code de la route sanctionne de deux ans d'emprisonnement et de 4 500 € d'amende, le conducteur ou l'accompagnateur d'un élève conducteur, lorsqu'une analyse sanguine démontre qu'il a fait usage de stupéfiants. Le dépistage des stupéfiants fait donc partie intégrante de la définition de l’infraction. Dans un souci d’efficacité, ce dépistage est admis très largement, tant à l’égard des conducteurs auteurs que des conducteurs victimes (1). En outre, pour que l’infraction soit constituée, il suffit d’une causalité présumée entre usage de stupéfiants et risque routier et non de la preuve d’un danger réel pour la sécurité routière (2).

 

1.1. Une infraction qui concerne tous les conducteurs

 

Le dépistage des stupéfiants est au coeur de la nouvelle infraction dont il devient un élément constitutif. Dans un souci d’efficacité répressive, la loi autorise très largement son emploi.

 

S'agissant des personnes contrôlées, outre les conducteurs, la loi étend l'obligation de dépistage aux accompagnateurs d'un élève conducteur. Le refus de se soumettre aux épreuves est puni des mêmes peines que l'infraction principale, deux ans d'emprisonnement et 4 500 € d'amende (art. L.235-3 C. route).

 

Pour déterminer les personnes soumises au dépistage, le législateur retient la notion d’implication. Cela signifie que même le conducteur dont le comportement n'a pas de lien causal avec l'accident est soumis au dépistage. En matière civile, la Cour de cassation a, par exemple, jugé à plusieurs reprises qu’un véhicule en stationnement pouvait être impliqué dans l’accident (Cass. 2ème civ., 29 nov. 2001, pourvoi n°00-10549). Il suffit donc de se trouver mêlé à l’accident pour être contrôlé. À l’extrême, on peut admettre le dépistage d’un conducteur dormant dans son lit dès lors que, pendant son sommeil, son véhicule en stationnement est heurté par un cyclomoteur.

 

Cela signifie également que le conducteur victime doit subir le dépistage à l'égal de l'auteur de l'accident. Or les conséquences d'un dépistage positif pour le conducteur victime sont à peine envisagées par le législateur. Que se passera-t-il si la victime a fait usage de stupéfiants ? Devra-t-elle subir une sanction pénale en plus de son préjudice corporel ou matériel ? On risquerait alors de voir une victime condamnée plus sévèrement que l'auteur de l'accident, alors même qu'elle n'a commis aucune faute et qu'elle conduisait avec prudence.

 

La seule précaution prise par le législateur est de réputer non écrite toute clause prononçant la déchéance de la garantie due par l'assureur en cas de condamnation pour conduite après usage de stupéfiants. Cette disposition existe déjà pour la conduite sous l'empire de l'alcool (art. 211-6 C. des assurances) et la Cour de cassation a eu l'occasion de rappeler qu'elle bénéficiait au conducteur dépisté positif à l'alcool (Civ. 1ère. 6 juin 2001, pourvoi n°98-1923 ). La victime conductrice qui aura fait usage de stupéfiants devrait donc être indemnisée civilement. Au delà, L'avenir dira peut être si les usagers de stupéfiants sont plus souvent auteurs ou victimes d'accidents de la circulation.

 

S'agissant maintenant des situations qui justifient de recourir au dépistage, la loi prévoit un contrôle obligatoire, un contrôle facultatif et un contrôle préventif .

 

Le contrôle reste obligatoire en cas d'accident mortel. L'article R.235-2 du code de la route définit l'accident mortel comme "celui qui a eu des conséquences immédiatement mortelles". Lorsque l'accident cause un dommage corporel, le dépistage est obligatoire s'il existe "une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner" que le conducteur a fait usage de stupéfiants. Dans le cas contraire, le dépistage est facultatif et laissé à l'appréciation des policiers. On ne voit pas très bien l'intérêt de distinguer ainsi caractère obligatoire ou facultatif tant les deux situations dépendent de l'appréciation très libre des forces de l'ordre. Le dépistage facultatif est encore étendu par l'alinéa 2 de l'article L .235-2 aux conducteurs et accompagnateurs d'un élève conducteur impliqués dans tout accident matériel. Il est également possible lorsque le conducteur est l'auteur présumé de certaines infractions au code de la route. La loi vise un grand nombre d'infractions, délits ou contraventions : infractions sanctionnées de la suspension du permis de conduire, infractions relatives à la vitesse des véhicules, au port de la ceinture de sécurité,du casque. Enfin, en dehors de toute infraction, un contrôle préventif est prévu s'il "existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'il a fait usage de stupéfiants". Le dépistage devient alors discrétionnaire. Les forces de l'ordre auront tout le loisir de décider quand et sur qui elles font procéder à un test.

 

Reste que la raison budgétaire risque de tempérer les ardeurs sécuritaires. On peut estimer à environ 17 millions d’Euros le coût minimum du dépistage (arr. 15 juill. 2002). Quant on sait que le budget 2003 prévoit une augmentation de « seulement » 14,76 millions d'Euros des frais de justice pour couvrir le dépistage des stupéfiants, l'évolution prévisible des dépenses de Justice, la revalorisation tarifaire des actes médicaux et les investigations sur les conséquences de l'infraction pour les victimes, le compte n'y est pas.

 

1.2. Un risque présumé pour la sécurité routière

 

La définition de l'infraction a évolué durant la procédure parlementaire. Dans sa rédaction initiale, la proposition de loi réprimait la conduite "sous l'influence" des stupéfiants. Il fallait donc démontrer que l'usage de stupéfiants modifiait la capacité de conduire de la personne mise en cause. Seul un seuil de consommation, comme pour l'alcool, peut permettre de fixer cette causalité. Or la détermination de ce seuil est une tâche titanesque. On compte plus de 180 stupéfiants ; autant de seuils d'influence à établir. En outre, pour le cannabis par exemple, il n'y a pas d'unanimité scientifique sur le niveau auquel ces seuils doivent être fixés. Au-delà de ces difficultés techniques, l'établissement d'un seuil peut également donner le sentiment d'une impunité en deçà, ce qui est en contradiction avec la prohibition absolue de l'usage de stupéfiants.

 

Le gouvernement a donc proposé de modifier la définition de l'infraction pour sanctionner le conducteur dont un dépistage sanguin permet de constater "qu'il a fait usage de stupéfiants". C'est cette rédaction qui est retenue dans le texte définitif. Il s'agit, selon le ministre, "d'éviter les discussions sans fin devant les juridictions pour déterminer si la consommation illicite de stupéfiants par le conducteur a ou non “influencé” son comportement". Mais cette réécriture de l'élément matériel fait surgir un nouvel écueil. L'influence de l'usage sur la capacité de conduite n'est plus exigée et on s'est interrogé pour savoir si la nouvelle définition supprimait l'exigence d'un lien de causalité entre l'usage et la conduite. La solution retenue consiste à exiger une causalité partielle entre l'usage et la conduite. L'infraction n'est constituée que lorsque l'usage a une influence sur la conduite, mais cette influence est présumée quand un dépistage sanguin permet de confirmer la consommation de drogue.

 

En effet, selon le ministre de la Justice, le dépistage sanguin décèle des consommations de stupéfiants remontant aux heures qui précèdent le contrôle et non à plusieurs semaines comme dans le cas du dépistage urinaire. À l'en croire, l'influence sur la conduite des consommations dépistées par voie sanguine serait donc certaine. On peut toutefois s'interroger sur le procédé qui consiste à faire dépendre une infraction des limites de la police scientifique. Qu'adviendra-t-il si, comme l'espère le ministre, les performances des tests s'améliorent grâce aux millions d'euros dépensés dans ces dépistages? Qu'adviendra-t-il si ces tests sanguins permettent de déceler des consommations de stupéfiants qui n'ont aucune incidence sur la capacité à conduire? Devra-t-on conserver l'interprétation littérale d'une loi mal rédigée ou s'en remettre à l'intention du législateur et exiger la preuve d'une influence?

 

D'autres questions restent en suspens, en particulier celle du dépistage urinaire positif et du dépistage sanguin négatif. En pratique, la police procèdera à un dépistage urinaire. S'il se révèle positif, un dépistage sanguin sera effectué dont les résultats détermineront l'existence ou non de l'infraction. Lorsque ce test sera négatif, les poursuites ne pourront avoir lieu sur le fondement du nouvel article L.235-1 du Code de la route. Mais ces poursuites resteront possibles pour usage simple de stupéfiants sur le fondement de l'article L.3421-1 du Code de la santé publique. En outre, la loi du 5 juin 2003 a prévu que les forces de police pouvait retenir sur le champ le permis d’un conducteur positif (L.224-1 C. route), le Préfet pouvant, à titre conservatoire, ordonner une suspension de ce permis pour une durée de 6 mois (art. L.224-2 C. route).

 

2. Une infraction dépendante des méthodes de dépistage

 

Les prouesses techniques de la « toxicologie analytique » ont servi d’argument durant les débats parlementaires pour justifier la répression de la conduite après usage des stupéfiants. En réalité ces techniques sont d’un intérêt limité dans le cadre d’une procédure pénale régulière. En effet, elles ne permettent pas aisément de rapporter la preuve d’un usage illicite de stupéfiants (1). Cela n’a pas empêché le gouvernement de consacrer, dans les textes d’application, le recours au dépistage rétrospectif lorsque la personne a déjà été condamnée pour conduite après usage de stupéfiants (2).

 

2.1. La preuve d’un usage illicite de stupéfiants

 

Une des principales difficultés auxquelles se heurte le dépistage est de savoir si la consommation de stupéfiants décelée dans l'organisme du conducteur est licite ou illicite. Le texte de la loi du 3 février 2003 recèle une ambiguïté. Lors de la discussion du projet de loi, les parlementaires et le gouvernement se sont clairement prononcés contre toute répression de la conduite après avoir consommé des médicaments. Mais, dans le même temps, l'infraction de "conduite après avoir fait usage de stupéfiants" est constituée par la simple découverte de stupéfiants dans l'organisme d'un conducteur.

 

Contrairement à ce que pourrait laisser croire une vision un peu simpliste du droit de la drogue, il n'y a pas d'un côté des produits interdits et de l'autre des produits autorisés. Les stupéfiants entrent dans la composition de nombreux médicaments et leur usage est parfaitement admis dans un cadre thérapeutique. On pense bien évidemment aux traitements de substitution, méthadone ou subutex®, mais bien au-delà à de très nombreux médicaments qui contiennent des opiacés, de l'éphédrine, des neuroleptiques, etc...

 

Les substances stupéfiantes peuvent aussi se retrouver à l'état de trace dans des produits industriels parfaitement licites. Tel est le cas, en particulier, des produits destinés à la consommation humaine contenant du chanvre dont l'exploitation et la commercialisation sont admis bien qu'ils contiennent du THC (G. Fournier, À propos de la teneur en D-9-THC dans les variétés de chanvre à fibres cultivées en France, Annales de Toxicologie Analytique, n°1, vol XV, 2003 ).

 

Si l'on prend à la lettre l'infraction de conduite après avoir fait usage de stupéfiants, toute consommation de plantes ou substances classées comme stupéfiant justifie la répression, que cette consommation soit légitime ou non. Une telle solution bouleverserait le droit de la santé en sanctionnant des patients sous traitement. Elle serait en outre contraire à la jurisprudence de la Cour de Justice des Communautés Européennes (CJCE Hammarsten, 16 janv. 2003, C462/01). Au contraire, si l'on tient compte de la volonté du Parlement de cantonner la répression au seul usage illicite de stupéfiants, il convient de vérifier que les substances décelées ne proviennent pas d'un médicament ou d'un produit en libre commerce avant d'entrer en prévention.

 

C'est cette dernière interprétation, téléologique, qui est privilégiée depuis 2001. Seul l'usage illicite de stupéfiants est punissable. L'ancien article R.235-5 c. route prévoyait ainsi, en cas de résultat positif, que "soit recherchés, afin d'éliminer tout facteur de confusion dans l'appréciation du rôle des stupéfiants dans l'accident en cause, les médicaments psychoactifs pouvant avoir des effets sur la capacité de conduire des véhicules". En clair il ne suffisait pas de dépister des stupéfiants, il fallait vérifier que ces stupéfiants n'avaient pas une origine légale.

 

Le décret du 31 mars 2003 pris en application de la loi du 3 février revient partiellement sur cette procédure en la rendant facultative (art. R.235-11 al.2 nouv. C. route). Lorsque l'examen clinique est positif, la recherche de l'usage de médicament doit être demandée par le conducteur ; elle perd son caractère automatique. L'objectif est manifestement de faciliter la tâche des experts ... et de réduire les coûts de la procédure. Mais on peut craindre que cet espoir ne soit déçu et que la nouvelle procédure ne fasse qu'introduire plus d'inégalité entre les justiciables.

 

En réalité, si l'on souhaite à la fois sanctionner l'usage illicite et excuser l'usage licite de stupéfiants, l'infraction de conduite après avoir fait usage de stupéfiants est extrêmement difficile à appliquer. Elle repose exclusivement sur l’efficacité du dépistage. Or la « toxicologie analytique » est à la fois une technique précise et aveugle. Précise parce qu'elle est capable d'identifier des stupéfiants à l'état de trace infime dans l'organisme. Aveugle parce qu'elle est incapable d'en déduire des conséquences légales et, en particulier, le caractère légitime ou non de la consommation. Non seulement la toxicologie est incapable de démontrer l’influence des stupéfiants sur la conduite au moment du dépistage, mais elle serait bien en peine de démontrer, tout simplement, que l'usage de ces stupéfiants était interdit. Que le conducteur affirme consommer régulièrement de la bière au chanvre ou prendre certains médicaments comme l’ibuprofène® et l’expertise sera contestable.

 

La seule solution envisageable consiste à bannir totalement l’usage des substances contenant des stupéfiants. -C’est ce que souhaite la DEA, la très répressive agence américaine de lutte contre les stupéfiants. Dans une circulaire interprétative du 31 mars dernier, elle réclame l’interdiction de commercialiser des produits à base de chanvre licite destinés à la consommation humaine car ils réagissent aux tests de dépistage. (Dpt. Of Justice – DEA, 21 CFR Part 138, 31 mars 2003, Fed. Regist., vol. 68, n°55, p.14113 et s.). La Cour de cassation a paru aller dans le même sens dans deux arrêts de principe en affirmant que le taux de THC n’entrait pas dans la définition légale du cannabis (Crim. 9 mars 1992, pourvoi n° 90-87478, B. n°103, p. 267, Crim. 5 fév. 1998, pourvoi n° 97-82890, B. n°49, p. 134). Mais cette interprétation ne peut plus prospérer, la CJCE ayant clairement affirmé que la prohibition des stupéfiants ne pouvait faire obstacle au développement du commerce légal du lin et du chanvre (CJCE Hammarsten, préc.). Le juge en sera donc réduit, soit à sanctionner une personne qui consommait des stupéfiants sans enfreindre la loi, au risque d'être critiqué par les juges européens, soit à ne pas sanctionner le conducteur malgré les résultats du dépistage.

 

2.2. La consécration du dépistage rétrospectif

 

Ces incertitudes n’ont pas entamé la foi inébranlable du gouvernement dans les vertus du dépistage puisque le décret du 31 mars 2003 consacre le recours au dépistage rétrospectif lorsque la personne a été condamnée pour conduite après usage de stupéfiants.

 

La sécurité routière n'est pas fondée exclusivement sur la répression. Elle fait également appel à des mesures administratives destinées à prévenir tout risque de réitération de l'infraction (F. Caballero et Y. Bisiou, Droit de la drogue, §208, p. 259 et s.). À ce titre, le Préfet doit soumettre à un examen médical tout conducteur condamné pour conduite sous l'influence de l'alcool et tout conducteur condamné à 1 mois de suspension du permis de conduire (anc. art. R.221-13 C.route). Si le résultat s'avère positif, il peut refuser la restitution du permis. Le décret du 31 mars 2003 étend cette procédure d’examen médical aux conducteurs dont le permis est suspendu ou retiré à la suite d’une condamnation pour conduite après avoir fait usage de stupéfiants. (art. 221-13, I C. route). Dans son principe, une telle modification doit être approuvée sans réserve. Mais ses modalités d’application soulèvent de nouvelles objections.

 

Le décret remplace en effet les termes « examen médical » synonymes de dépistage sanguin par la formule : "des analyses ou des examens médicaux, cliniques et biologiques, notamment salivaires et capillaires". Une nouvelle fois, cette définition trouve son origine dans la campagne d'influence des toxicologues déjà largement mis à contribution lors de la discussion parlementaire ( Lire « le point de vue de 10 experts judiciaires en toxicologie»). L’objectif des promoteurs de cette mesure est double: faciliter le dépistage grâce aux examens salivaires en évitant la procédure lourde et onéreuse de l’analyse sanguine, et déceler l'usage de stupéfiants sur une période plus longue grâce aux examens capillaires. La recherche de stupéfiants dans les cheveux est en effet censée permettre la constitution d’un « profil de consommation » sur plusieurs semaines ou plusieurs mois. Cinq centimètres de cheveux représenteraient approximativement un mois de consommation et il serait possible de « lire » ainsi dans les cheveux les phases d’usage et d’abstinence.

 

Cet optimisme technologique doit être tempéré. Il serait assez facile de faire disparaître les fameuses traces de stupéfiants de la chevelure. De nombreux shampoings préparés à cet effet sont proposés sur Internet. Ensuite, la fiabilité des tests est contestée par certains auteurs, notamment à propos de l’identification de l’ecstasy est des drogues de synthèse (J. Ditton, Technical Review. Hair Testing: just how accurate is it?, Surveillance & Society 1(1): 86-101).

 

Enfin, indépendamment du débat d’experts pour lequel nous sommes peu compétent, le dépistage rétrospectif pose une question de politique criminelle. En remontant dans la consommation, les stupéfiants identifiés sur les cheveux peuvent être ceux qui ont déjà été dépistés lors du contrôle routier initial. Il ne s’agit plus de s'assurer de la volonté d'amendement du condamné et de vérifier l'absence de dangerosité après le retrait de permis, mais de renforcer la répression du conducteur déjà sanctionné. La mesure n’a plus valeur de protection de la société mais plus prosaïquement d’exclusion et de stigmatisation des personnes dépistées.

 

3. Une infraction d’une grande sévérité

 

Il faut tout d’abord rappeler que l’usage simple de stupéfiants est puni d’un an d’emprisonnement et 3 750 € d’amende. Lorsque cet usage est constaté à l’occasion d’un contrôle routier, l’ article L. 235-1 du Code de la route porte l’emprisonnement à 2 ans et l’amende à 4 500 €. Cette sanction initiale est complétée par un ensemble de circonstances aggravantes, personnelles et mixtes, que la loi renforçant la sécurité routière du 12 juin 2003 a encore renforcées.

 

Ainsi, lorsque l’usage de stupéfiants se cumule avec une consommation d’alcool au delà des seuils légaux, la peine est portée à 3 ans et 9 000 € d’amende (art. L. 235-1 al. 2 C. route). Si l’usager cause un dommage corporel ou un homicide, la peine peut atteindre, selon les cas, entre 3 ans d’emprisonnement et 45 000 € d’amende et 10 ans d’emprisonnement et 150 000 € d’amende. Une peine d’emprisonnement identique à celle encourue par les trafiquants.[Lire le tableau détaillé des peines encourues] .

 

À ces peines de référence s’ajoutent de très nombreuses peines complémentaires, suspension ou retrait de permis (qui peut être définitif), interdiction de conduire une voiture sans permis, obligation de suivre un stage de sensibilisation au risque routier, confiscation du véhicule, etc…

 

Les règles relatives à la récidive sont également durcies. Les infractions de conduite sous l'empire de l'alcool ou des stupéfiants sont assimilées pour constituer les deux termes de la récidive. Être dépisté positif aux stupéfiants lorsque l'on a déjà été condamné pour conduite en état d'ivresse, par exemple, constitue une récidive.

 

Mais, surtout, aucune alternative thérapeutique n'est prévue en cas de dépistage positif aux stupéfiants. Depuis la loi du 31 décembre 1970, lorsqu'une infraction d'usage est constatée, la peine peut être écartée au profit d'une désintoxication (art. L. 3423-1 et s. C. santé pub.). Dans la loi nouvelle, le législateur n'a pas songé à renvoyer à cette procédure. Pourtant les conditions du dépistage font qu'un simple usager peut être dépisté et sanctionné. Voici un usager contrôlé positif en l'absence de tout accident, de toute infraction au code de la route, assis dans son véhicule à l'arrêt, et la seule réponse prévue par la loi est l'amende et l'emprisonnement. Cette différence de traitement avec l'usager simple pose la question de la conformité de ces dispositions avec le principe d'égalité des citoyens devant la loi. Certes d'autres moyens de traitement forcé existent au titre des obligations de soin. Certes l'article L. 3423-1 du code de la santé publique, qui vise l'usage de stupéfiants de façon générale, permettra peut-être aux procureurs de la République d'ordonner une injonction thérapeutique en cas de dépistage positif. Toutefois, l'absence de réflexion sur le sujet souligne combien la perspective du législateur est purement répressive. C'est la première fois depuis 1970 qu'une loi relative à l'usage de stupéfiants n'a pas pour ambition de faire cesser cette consommation mais seulement de la sanctionner.

 

Cette véritable obsession répressive a même conduit le législateur à rendre applicable la loi du 3 février 2003 en Polynésie Française afin, paraît-il, de lutter contre les risques liés à la consommation de "Pakalolo". Cette substance dont le nom n’apparaît pas dans la liste des stupéfiants est décrite par le rapporteur de la commission des lois de l’Assemblée Nationale comme étant "une herbe locale très fumée en ces régions". Ce grand spécialiste de l'effet des stupéfiants sur la conduite automobile sera certainement heureux d'apprendre que cette "herbe locale" est en réalité du cannabis, le nom "pakalolo" étant dérivé de l'hawaien "paka" qui signifie "brule" et "lolo" le cerveau... Une chance, d’une certaine façon puisque sinon la plante n’étant pas classée parmi les stupéfiants elle n’aurait pu justifier une répression.

 

Conclusion

 

Avec la publication de ce décret, le dépistage des drogues au volant apparaît de plus en plus pour ce qu’il est : une entreprise d’influence menée par un groupe socio-professionnel soucieux de développer son activité. Dans une conférence prononcée le 19 juin 2002, un de ces lobbyiste posait parfaitement les termes du débat :

« cette presse peut être également utile à l'expert pour asseoir sa notoriété ou favoriser sa promotion … Informer le public, lui donner envie de lire ce journal plutôt qu'un autre, interpréter un fait avec une dimension politique, ou faire parler de soi et assurer la promotion de son laboratoire, publier le cas dans un journal scientifique avant le jugement (qui peut être retardé, surtout s'il y a Appel en Assises), voilà le délicat mixage entre expertise et média» (P. Kintz, Expertises et média : la vérité n'appartient pas qu'aux journalistes, Xème congrés annuel de la SFTA, 19 et 21 juin 2002, Martigny, Suisse).

 

Il est tout de même curieux que personne ne se soit ému du conflit d’intérêt qui existe en matière de dépistage. Ceux qui demandent avec force le dépistage sont en même temps ceux qui diffusent l’information sur les tests, qui valident scientifiquement et publient (parfois) cette information avec force référence à leurs propres travaux, puis qui tirent profit socialement et économiquement comme experts judiciaires ou membres de commissions publiques (arr. 23 janv. 2003 relatif à la commission nationale des stupéfiants), de la diffusion de ces tests. Ils font office tout à la fois de « société civile » et de « France d’en bas » à travers des réseaux associatifs, de « société savante » à travers des associations et revues professionnelles dédiées au dépistage, et de prestataires de service pour les juridictions. Même s’ils sont de bonne foi, cette confusion des genres n’est pas faite pour renforcer la crédibilité scientifique de leur démarche.

 

Dès lors, pour avoir un certain recul, il n’est pas inutile de se transporter aux États-Unis où les tests sont utilisés depuis plus de dix ans à l’occasion de contrôles routiers mais aussi dans les entreprises et même les écoles. La Cour Suprême des États-Unis a en effet admis la constitutionnalité de ces mesures de contrainte dans les écoles au nom de leur efficacité supposée dans la lutte contre les stupéfiants (US Sup. Court, Board of education of independent school district n°92 of Pottawatomie County v. Earls, n° 01-332. 27 juin 2002)

 

 

Aux États-Unis donc, le dépistage est devenu un marché, un marché estimé à 600 millions de $ par an. Un marché pour les experts de tous ordres, y compris les juristes, un marché pour les laboratoires qui produisent les tests, et même un marché pour les laboratoires qui commercialisent des produits, shampoings, urine « propre », produits masquants qui neutralisent les tests ! En constatant le nombre d’entreprises des deux types présentes sur le réseau Internet, on se dit que ce marché doit être rentable.

 

La fin justifiant - pour certains - les moyens, cette généralisation des tests a-t-elle au moins facilité les procédures judiciaires ? La surenchère à laquelle se livre la DEA en réclamant l’interdiction de la commercialisation de tout produit contenant du THC destiné à la consommation humaine, l’alerte déclenchée par la Food and Drug Administration, l'autorité sanitaire fédérale, à propos de faux positifs au cannabis (https://www.fda.gov/medwatch/SAFETY/2002/sep02.htm) soulignent que l'efficacité des tests n'est pas si évidente que les toxicologues veulent bien l'affirmer.

 

La généralisation des tests a-t-elle au moins réduit la demande de drogue ? Peu de résultats étaient disponibles mais deux études récentes financées par le NIDA (National Institut Against Drug Addiction) semblent démontrer le contraire. Même s’il est trop tôt pour considérer leurs conclusions comme définitives ces deux études constatent que le dépistage n'a pas d'effet dissuasif sur la consommation de stupéfiants chez les jeunes et qu'en outre, il favorise des stratégies de diversion : détournement de la loi et abus d’alcool plus fréquent. La prévention permettrait, selon une de ces études, d'obtenir de bien meilleurs résultats en termes de diminution de la prévalence (R. Yamaguchi, L. D. Johnston, P. M. O’Malley, Relationship between student illicit drug use and school drug-testing policies, Journal of School Health, apr. 2003, vol. 73, n°4, L. Goldberg, L. Elliot, P. Mc Kinnon, E. Moe, K. S. Kuehl, L. Nohre, M. Lockwood, Drug Testing Athletes to Prevent Substance Abuse: Background and Pilot Study Results of the SATURN (Student Athlete Testing Using Random Notification) Study, Jour. of adolescent health 2003;32:16–25). Ce n’est malheureusement pas l’orientation retenue par les lois récentes qui se succèdent en France.

 

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  • 2 mois après ...

Salut

Petit passage pour vous dire qu'en cas de demande de prélèvement ADN vous êtes en droit de REFUSER!

grâce à la jurisprudence du tribunal de mâcon du 21/03/2007

Camille a été relaxée le 21 mars 2007 par le tribunal de Mâcon. On apprend aussi que la consommation de cannabis est du ressort du code de la santé publique, et non du code pénal, et du coup ne peut pas faire l’objet d’un prélèvement d’ADN.

 

Cette affaire a débuté dans la nuit du 8 septembre 2006, où une jeune fille de 26 ans, Camille, qui se trouvait dans une voiture avec un ami sur le parking d’un petit village dans les environs de Mâcon, s’est fait contrôler par une patrouille de gendarmerie. Sans motif, les gendarmes ont fouillé la voiture et n’ont trouvé dans la boîte à gants qu’une pipe à eau. Puis ils les ont fouillé aussi tous les deux sans trouver ni sur eux ni dans la voiture la moindre trace de quelque chose de répréhensible. Ils ont cependant arrêté l’ami de Camille et l’ont placé en garde à vue avant de le relâcher avec un simple rappel à la loi. Mais le surlendemain, Camille a été convoquée à la gendarmerie pour un prélèvement de son ADN : ce qu’elle a catégoriquement refusé. Et voilà pourquoi, le 21 mars, Camille passe en jugement !

 

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post sympa et intéressant, merci ! :-P;):-P

 

 

mais on trouve helas tjrs la france hermetique au canna !

a l'heure ou 70% de l'Europe assoupli ses lois...

notre retard en la matière n'est pas énorme, il est préhistorique !

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  • 1 mois après ...