Comédie canadienne loufoque sur la culture rédemptrice du cannabis


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Cinéma
Les mauvaises herbes


Québec, 2016, 105 minutes. Comédie dramatique de Louis Bélanger. Scénario : Louis Bélanger et Alexis Martin. Avec Alexis Martin, Gilles Renaud, Emmanuelle Lussier-Martinez, Luc Picard.

On n’est pas dans la haute moralité. Un peu comme pour Les Bougon (série également portée au grand écran), les personnages s’offrent une éthique à géométrie variable. Mais c’est par cette bande de multipoqués que rebondit l’action des Mauvaises herbes, comédie de Louis Bélanger bien plus drôle que celles qui ont envahi nos écrans depuis plusieurs lunes.

 

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Photo: Films Séville Le personnage d’Alexis Martin est contraint de travailler dans sa grange où il cultive des plants de cannabis.

 

Il a écrit son scénario à quatre mains avec l’homme de théâtre Alexis Martin, qui tient aussi le rôle principal. Le cinéaste de Gaz Bar Blues et de Post Mortem n’avait pas tourné de long métrage depuis 2010 avecRoute 132. Le voici en selle dans un registre résolument saugrenu, qui greffe une éthique de solidarité et d’ouverture d’esprit sur le plus cynique postulat, « tout le monde a son prix ». La solide équipe de comédiens contribue au succès du film, dont le rythme vacille parfois mais retombe sur ses pattes.

 

Pur effet de coïncidence, l’excellente ouverture rappelle celle du Birdman d’Alejandro González Iñárritu, avec ce plan-séquence du comédien (Alexis Martin) qui sort par la petite porte du théâtre, mais il est de son côté bel et bien habillé, en costume du XVIIIe siècle. En proie au démon du jeu, il s’évade en cette tenue pour échapper au créancier qui le taraude, en une bonne scène de poursuite. Et le voici dans une campagne perdue sous le blizzard, bientôt sur la ferme d’un ermite (Gilles Renaud) qui le contraint de travailler dans sa grange où il cultive des plants de cannabis pour le compte des motards.

 

Réconcilier les contraires

 

Sur cette trame en délire, si ouvertement loufoque qu’on lui pardonne des invraisemblances, des amitiés improbables se tissent, le syndrome de Stockholm fleurit sans complexes. Le reclus rétif du début, forcé par chantage à devenir jardinier et même bûcheron à ses heures, se lie d’amitié avec son geôlier. Idem pour une jeune employée de l’Hydro venue mettre son nez là où il ne fallait pas (Emmanuelle Lussier-Martinez).

 

Si les pleurs de la jeune interprète paraissent peu convaincants au départ, son jeu prend de l’assurance et son personnage de fille fonceuse et partante finit par s’imposer. Le jeu exceptionnel de Gilles Renaud en vieil excentrique haïssable qui s’humanise domine le film, mais Alexis Martin, qu’on a rarement vu aussi détendu, est très bien aussi. L’humour joue sur la dichotomie ville/campagne, culture/inculture, jeunesse/âge mûr, en réconciliant les contraires.

 

La dynamique du trio bancal roulait tant bien que mal sur ses rails, avant l’arrivée importune du créancier (Luc Picard, solide en très méchant quoiqu’un peu trop bébête finalement, ce qui justifiera son sort) aux trousses du comédien dans cette ferme où il n’est point bienvenu. Chacun des protagonistes a des choses à se reprocher et Les mauvaises herbes deviendra bel et bien un film de rédemption, après cheminement des uns et des autres.

 

La caméra de Pierre Mignot magnifie les paysages sauvages des montagnes et forêts du Québec, rendant ainsi hommage à leurs immensités hivernales avec parfois une silhouette humaine à l’avant-plan, façon tableau de Jean-Paul Lemieux. La musique, en mariant tous les genres, dont le soul et le classique, ouvre sur l’universalité de l’ode à l’amitié et à l’amour paternel cachée sous la grogne.

 

On n’accorderait pas un prix de scénario aux Mauvaises herbes, mais les personnages en général attachants, le mélange de rire et d’émotion, la qualité de jeu et la mise en scène dynamique de Louis Bélanger font oublier quelques longueurs ici et là, et le film amuse sans verser dans les clichés, la facilité et la vulgarité.

 

 

 
Source: ledevoir.com
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