Fumer du pot pour se soigner: témoignage d'une patiente


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Aurélie (*) consomme du cannabis à des fins thérapeutiques depuis un peu plus d'un an. Elle assure que cela soulage ses douleurs abdominales qui sont associées à sa maladie de Crohn, une maladie inflammatoire chronique du système digestif. Et ce, malgré le fait que la marijuana n'est toujours pas reconnue comme médicament par le Collège des médecins.

 

 
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    Photo Fotolia

    Des «cliniques» offrent du cannabis à usage thérapeutique à des patients souffrant de certaines pathologies. Le malade doit théoriquement prouver sa condition et présenter une ordonnance d'un médecin pour s'en procurer.

 

Avant d'en venir au cannabis, Aurélie a pourtant essayé bien d'autres médicaments pour soulager ses crampes. «L'un d'eux, d'après certains médecins, m'aurait même causé un cancer», assure la jeune femme. Sans parler de leur inefficacité: «Je devais me lever encore quatre à cinq fois par nuit pour aller aux toilettes», témoigne-t-elle.

 

Elle s'est finalement rendu compte qu'après avoir fumé du pot, ses douleurs partaient «instantanément».

Elle commence alors à se renseigner et découvre l'huile de cannabis. «Je me suis dit qu'il fallait que je sois suivie par des professionnels. J'ai alors découvert la clinique de la Croix verte, à Montréal», explique-t-elle.

 

 
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    Photo Delphine Jung / Canoe.ca

    «Le cannabis n'est pas un traitement reconnu», indique toutefois le Dr Yves Robert, premier secrétaire du Collège des médecins du Québec.

 

Depuis 2014, cette «clinique» offre du cannabis à usage thérapeutique à des patients souffrant de certaines pathologies comme le VIH, la sclérose en plaques ou la maladie de Crohn. Le malade doit prouver sa condition et présenter une ordonnance d'un médecin pour s'en procurer.

«Mais aucun ne fournit de telles ordonnances... Mon gastro-entérologue a au moins attesté de ma condition pour que je puisse aller à la clinique. Il ne semblait pas s'en alarmer», raconte Aurélie.

 

Mais si les médecins rechignent à prescrire (sauf dans le cadre d'un programme de recherche) pour l'instant le cannabis à des fins thérapeutiques, c'est parce qu'il n'est pas considéré comme un médicament par le Collège des médecins du Québec. «Le cannabis n'est pas un traitement reconnu. Malgré les publications sur le sujet, on ne sait toujours pas quels sont les indications, les dosages, la forme, les effets bénéfiques et secondaires, et quelles sont les interactions avec les autres médicaments qu'un patient peut consommer», détaille Dr Yves Robert, premier secrétaire du Collège des médecins du Québec.

 

Le Dr Michael Dworkind, directeur médical de la clinique Santé Cannabis à Montréal, en revanche, n'hésite pas à dire que son travail sur la marijuana «n'est pas fondé sur la foi ou sur une croyance. Il existe des preuves scientifiques qui peuvent appuyer l'utilisation du cannabis et des cannabinoïdes pour certaines conditions médicales. Dans les soins palliatifs par exemple, on observe une vraie amélioration de la qualité de vie, et ça, c'est important».

 

La recherche embryonnaire

 

La majorité des effets thérapeutiques recensés ont été signalés par des patients, plutôt que par des études cliniques fiables, assurent les médecins. Le docteur Yves Robert estime que la recherche en est à ses «balbutiements» et l'explique : «C'est un produit naturel qui ne peut pas faire l'objet d'un brevet. Donc aucune compagnie pharmaceutique n'est intéressée à faire des produits à base de cannabis. Sans brevet, ils n'ont pas l'exclusivité du marché».

 

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  • Photo Courtoisie

    Des produits comestibles contenant du cannabis sont apparus dans des dispensaires de cannabis médical au Canada.

 

C'est justement l'industrie pharmaceutique qui ralentirait le processus d'après Dr Dworkind: «Le cannabis apparaît comme menaçant pour eux car il est bien plus efficace que les médicaments conventionnels, ils ont intérêt à ce qu'il reste interdit». Il ajoute: «Les médecins sont très conservateurs. Le cannabis est pourtant plus sûr que les opioïdes et que beaucoup d'autres médicaments, notamment car on ne peut pas faire de surdose de marijuana», assure le Dr Dworkind.

 

Mais le Dr Robert met aussi en avant les nombreux effets secondaires liés à la consommation de marijuana. Des désagréments confirmés par Aurélie: «C'est sûr que je vais être un peu gazée, je vais avoir un brouillard dans la tête». Elle assure donc ne jamais en consommer lorsqu'elle travaille, mais uniquement le soir. Sa consommation s'élève à 1 gramme par semaine au maximum. Quant aux biscuits au cannabis, elle en prend une moitié, voire un entier tous les soirs avant de s'endormir et assure ne plus avoir besoin de se lever une seule fois pour aller aux toilettes. Elle n'a pour autant pas supprimé de sa pharmacie les médicaments plus conventionnels qu'elle doit prendre, mais en a diminué les doses.

 

Ce double traitement a en revanche un coût. Ses médicaments traditionnels lui reviennent à 10 000 $ par mois, entièrement remboursés par les régimes d'assurance. Pour le cannabis, elle débourse beaucoup moins: 150 $ par mois, mais ne touche aucun remboursement. «C'est un soin de luxe, c'est sûr», avoue-t-elle.

 

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  • Photo Courtoisie

    Des produits comestibles contenant du cannabis sont apparus dans des dispensaires de cannabis médical au Canada.

 

Aurélie comprend en tout cas la réticence des médecins, parce que «ça sort un peu de leur manuel», mais aimerait que l'image de la marijuana change: «Regardez-moi, est-ce que j'ai l'air d'une junkie toute croche ?»

Le projet de loi visant la légalisation du cannabis devrait être déposé par le gouvernement libéral de Justin Trudeau au printemps 2017.

(*) le prénom a été modifié 

 

Ce que dit Santé Canada
  • Si une personne souhaite utiliser du cannabis à des fins médicales, elle doit tout d'abord consulter un médecin.
  • Pour se procurer du cannabis à des fins médicales, une personne peut l'acheter auprès des 36 producteurs canadiens autorisés, s'inscrire auprès de Santé Canada pour production personnelle ou désigner une autre personne qui le produira pour elle.
  • Lorsqu'un client cherche à se procurer du cannabis auprès d'un producteur autorisé, il fait une commande par la poste, par téléphone ou en ligne.
  • Les comptoirs de service qui vendent de la marijuana, communément appelés «dispensaires» et «clubs de compassion», ne sont pas autorisés à vendre du cannabis à des fins médicales ou autres. Ces commerces sont approvisionnés illégalement et fournissent des produits non réglementés qui peuvent être dangereux.

- Agence QMI

 

Source: canoe.ca

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