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N'oublions pas le plaisir des drogues dans le débat sur la contraventionnalisation


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L'usage de cannabis ne devrait plus être un délit et une commission parlementaire a entendu les usagers, comme les policiers, les juges ou les parents. Il reste à faire un pas vers la banalisation du pétard.

 

Une bouteille à moitié pleine, un joint à moitié fumé, les métaphores macroniennes sont de sortie à la lecture du rapport remis par la commission parlementaire chargée d’étudier une procédure d’amende pour le délit d’usage de stupéfiants. C’est également un débat qui exclut toute référence à la motivation essentielle du public, celui du plaisir que l’on a à consommer une substance psychoactive.

La question demeure, le plaisir des drogues est-il susceptible de «contravention» ? La sacro-sainte loi de 1970 ampute le débat de son argumentaire le plus efficace : si l’on consomme des drogues c’est d’abord parce que «ça fait du bien».

En marche vers la légalisation ?

Peut-on aujourd’hui se permettre de tels propos qui valent toujours cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende selon l’article L3421-4 du Code de la santé publique qui criminalise toute présentation des stupéfiants sous un jour favorable ? La réponse est oui, parce que les temps ont changé. Le leader mondial de la prohibition de drogues a tourné casaque. Empêtré dans une effroyable épidémie d’overdoses, l’Amérique ne parle aujourd’hui que traitement médical et prise en charge compassionnelle. Fini l’incarcération de masse des habitants du ghetto, qui fonde l’histoire de la «war on drugs».

 

Même le président Trump, entouré de féroces guerriers antidrogues comme Jeff Session, le ministre de la Justice, ne peut se résoudre à braver son électorat très attaché à la liberté individuelle, aux valeurs du marché, et aux droits des Etats qui libéralisent le cannabis les uns après les autres. Cette Amérique Blanche issue des classes moyennes, prend du cannabis pour se soigner ou pour s’éclater, et elle ne veut plus mourir d’overdoses par voie de prescription. Aujourd’hui les Etats-Unis et bientôt le Canada, donnent le signal du redéploiement international vers les marchés légaux du cannabis, en attendant d’autres substances.

 

A Oakland, en Californie, un employé de Kiva Confections prépare des plaquettes de chocolat à la la marijuana, le 16 janvier, alors que l'usage des drogues douces est devenu légal dans cet Etat. Photo: Justin Sullivan/Getty Images/AFP

Des plaquettes de chocolat à la la marijuana, le 16 janvier, à Oakland, en Californie. L’usage des drogues douces est devenu légal dans cet Etat américain. (Photo Justin Sullivan. Getty. AFP)

Le projet de contraventionnalisation si décrié est peut-être la première étape d’En marche vers cette régulation de stupéfiants à but si lucratif. Une contravention c’est avant tout un signe adressé aux consommateurs, aux usagers, interpellés non plus au titre du délinquant ou du malade, mais à celui du contribuable en attendant de pouvoir s’adresser au citoyen. En décidant de l’objet même de la commission parlementaire le gouvernement LREM a conscience du saut qualitatif qu’il accomplit. Jusqu’ici toutes, absolument toutes, les discussions publiques orientées vers une modification de la loi s’adressaient aux policiers, bien sûr, et aux parents. Les consommateurs étant considérés comme d’éternels mineurs. Or parmi les auditionnés figurent des policiers et des juges, certes, mais aussi des associations d’usagers de drogues parmi lesquelles Autosupport des usagers de drogues (Asud) (1).

Robin Reda, le flic gentil

L’une des curiosités du rapport et non des moindres est de voir Robin Reda, jeune loup LR, plaider pour une simple amende déjudiciarisée, dès lors que le trouble à l’ordre public n’est pas constaté. Le policier, dressé à la chasse aux petits délinquants a tendance à percevoir le trouble à l’ordre public selon une gamme chromatique toute personnelle où l’apparence physique, l’habillement, la coiffure, les mauvaises langues ajoutant l’origine ethnique (2), tiennent une place toute subjective, source de bien des interprétations.

 

Dans un message subliminal adressé aux classes moyennes jeunes et diplômées, la rumba «en même temps» de la commission prend alors tout son sens. Robin Reda, c’est un peu le flic gentil quand son corapporteur, Eric Poulliat, issu lui d’En marche, propose une pénalité financière qui reste inscrite au casier judiciaire. L’apôtre de l’arbitraire policier déguisé en ami des fumeurs de joints. Vous avez dit poudre de perlimpinpin ?

 

Eux et nous

Revisitons d’autres débats de nature comparable. Le mariage pour tous par exemple. Pour polémique qu’il fut, il a vu s’affronter des associations LGBT et des associations familiales à orientation confessionnelle, sans intermédiaire superflu. Autre sujet sensible, la pénalisation des clients de prostitués. Son arène médiatique fut un tremplin pour des associations de travailleuses et de travailleurs du sexe, comme le Strass. On a même vu des personnalités célèbres endosser le costume particulièrement voyant du client de prostitué.e.s adultes et consentants.

 

Mais pour les drogues, le rituel du «eux» et «nous» reste de mise dans la plupart des grands médias. Eux les «drogués», nous «les parents». Eux les «addicts», nous «les soignants». Eux les «dealers», nous les «policiers». Le débat sur les drogues n’a pas encore atteint son âge sa majorité légale. Nous oublions que ce fut longtemps le cas de la parole homosexuelle coincée entre le témoignage d’un «inverti» et le diagnostic d’un psychiatre. On oublie également que le combat féministe aussi a dû subir aussi ce préjugé de «minorité perpétuelle» qui faisait de l’Eglise catholique le censeur acharné de la sexualité des femmes. Le plaisir des drogues est entravé par ces mêmes dispositions juridiques qui ont si longtemps régi le plaisir des femmes et celui de gays, il est illicite.

 

Alors ayons le courage de dire que le véritable débat devrait nous épargner l’hypocrisie du «eux» et «nous». Une discussion qui mobilise la convivialité, le partage, la découverte, la culture quand elle s’applique au fruit de la vigne et qui devient suspecte quand elle franchit la barrière de l’illicite. Le «plaisir des drogues» est en réalité une simple banalité neurobiologique. Une banalité qui, en l’état de la législation, fait de nous tous les otages potentiels de la police et en même temps des mafias.

(1) La «contraventionalisation» de l’usage de stupéfiants : un bâton en forme de carotte. Mediapart

(2) La guerre aux drogues : une guerre raciale. Libération

Par Fabrice Olivet Directeur de l'association Asud (Autosupport des Usagers de Drogues)

 

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Hey

 

la phrase qui perso me choque ..... :

 

Une contravention c’est avant tout un signe adressé aux consommateurs, aux usagers, interpellés non plus au titre du délinquant ou du malade, mais à celui du contribuable en attendant de pouvoir s’adresser au citoyen.

 

les associations de malades refusent ce système .... pas de contraventions pour les malades .... et quitte à s'adresser à qq autant s'adresser direct au citoyen plutôt qu'au contribuable (la ça fait presse citron) au lieu de le prévoir pour un avenir incertain .....

 

ça c'est fait ....

 

@+

 

 

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  • 3 semaines après ...

Hey

 

petit déterrement ....

 

source : http://police.etc.over-blog.net/2018/03/non-a-la-contravention-pour-usage-de-drogues.html

 

@+

 

Non à la contravention pour usage de drogues

2 Mars 2018

Non à la contravention pour usage de drogues

En juillet 2017, le ministre de l’Intérieur entendu par la commission des Lois fait le constat d’une répression de l’usage de drogues inefficace, sans effet dissuasif, et néanmoins très chronophage pour les forces de l’ordre (1.2 millions d’heures en 2016)ob_ebaa90_link-ext.jpg L’idée est donc de mettre en place une procédure simplifiée en forfaitisant cette infraction, et de l’inclure dans la future loi de réforme de la procédure pénale.

Tous les chiffres et indicateurs sont éloquents : les interpellations pour usage ne cessent d’augmenter et ce, trois fois plus que celles pour trafic.
- Usage de drogues : 63,7 % en 2012 - 68,1 % des ILS* en 2016
- Trafic : 7,1 % en 2012 - 3,2 % des ILS en 2016
La France est pourtant le pays le plus répressif, et aussi le plus gourmand d’Europe en stupéfiants, notamment cannabis, opiacés, cocaïne et MDMA.

Pour la dépénalisation de l’usage des droguesob_ebaa90_link-ext.jpg

La répression est sans effet sur l’usage de drogues, très peu compatible avec la prévention, l’action publique est en échec flagrant depuis la loi de prohibition de 1970, mais le gouvernement a décidé de persévérer dans une logique punitive.

Une mission d’information relative à l’application d’une procédure d’amende forfaitaire au délit d’usage illicite de stupéfiants a donc été créée pour évaluer ce dispositif, et alimenter sa réflexion de multiples auditions, experts et parties prenantes dans le débat (police, gendarmerie, justice, etc.) parmi lesquels les représentants de ce qui est relatif aux dispositifs sanitaires et sociaux, toxicomanies et addictions, prévention et réduction des risques, et les usagers de drogues, sont sous-représentés.
Table ronde Fédération Addiction, CNDCH, et associations d'usagers et de réduction des risquesob_ebaa90_link-ext.jpg

En préambule du rapportob_ebaa90_link-ext.jpg et après avoir indiqué que la loi de 1970 n’avait atteint ses objectifs ni en terme de santé publique, ni dans le registre de la répression, figure l’avertissement suivant :

« Cette mission n’a pas pour objet de réfléchir à la lutte contre la toxicomanie ou à la réforme de la loi du 31 décembre 1970... »

Ça peut sembler paradoxal et cynique, mais au moins c’est clair.


Amende forfaitaire : contravention ou délit ?


Les deux rapporteurs de cette mission se distinguent sur le genre de forfaitisation à mettre en place.

• L’un (Robin Reda, LR) préconise une contravention de 4è ou 5è classe (aux modalités et incidences judiciaires pourtant très différentes) et, si normalement celle-ci éteint l’action pénale, la police pourra toutefois user de solutions alternatives, ou simplement établir une procédure de détention de stupéfiants plutôt que d’usage. Les deux infractions étant concrètement indissociables, bien que figurant pour l’une dans le code pénal, et l’autre dans le code de la santé publique.
Aucune quantité n’étant fixée par loi, le délit de détention peut s’appliquer à tout usager.

• L’autre rapporteur (Éric Poulliat, LREM) plaide pour une amende forfaitaire délictuelle, celle qui a la faveur du gouvernement. Cette amende d’un nouveau genre, initialement créée en 2016 pour être appliquée à deux délits routiers, est restée en suspens, encore inopérante d’un point de vue technique, logistique et juridique.
Malgré cela, c’est l’option retenue en matière d’usage de drogues, infraction pour laquelle, en plus, des dispositions spécifiques annexes seraient nécessaires.
L’amende forfaitaire délictuelle sanctionne un délit via l’agent verbalisateur, elle s’inscrit dans le TAJ* et, de caractère optionnel, elle permet de conserver les possibilités de coercition et d’enquête propres à cette catégorie d'infractions.

La forfaitisation de l’infraction d’usage de drogues n’est qu’une réponse pénale de plus, qui s’ajoute à celles prévues par la loi, mais qui va permettre une répression accrue et systématisée.
(la DACG* prévoit déjà que ce dispositif entraînera une augmentation des interpellations)

Mise à jour 14 mars 2018

Projet de loi de programmation pour la justice 2018-2022ob_ebaa90_link-ext.jpg

Au chapitre Dispositions clarifiant et étendant la procédure de l’amende forfaitaire, il est indiqué (pages 40-41) que c’est l’amende forfaitaire délictuelle qui sera donc appliquée, et que l’article L. 3421-1 du code de la santé publique sera modifié par le rajout de l’alinéa suivant :

« Pour le délit prévu au premier alinéa, y compris en cas de récidive, l’action publique peut être éteinte, dans les conditions prévues aux articles 495-17 et suivants du code de procédure pénale, par le versement d’une amende forfaitaire d’un montant de 300 €. Le montant de l’amende forfaitaire minorée est de 250 € et le montant de l’amende forfaitaire majorée de 600 €. »

(le rapport de la mission d'information avait préconisé une amende d'un montant compris entre 150 et 200 euros)


Sur le terrain, que fait la police ?


Le dispositif de l‘amende forfaitaire délègue donc la réponse pénale à l’infraction d’usage de drogues aux forces de l’ordre, plus que jamais en première ligne de la politique publique des drogues.

Pragmatique ?

Il conviendra d’équiper les patrouilles de smartphones et tablettes NEO pour un accès direct au TAJ (les antécédents judiciaires étant incompatibles avec l’amende forfaitaire) et de quoi éventuellement percevoir l’amende sur le lieu de l’infraction. Mais aussi de kits de détection, de balances de précision, d’un matériel avec scellés dédié aux saisies, afin de s’assurer et garantir la validité de la procédure - aussi indispensable en cas de contestation de l’amende, recours dont le traitement fait déjà partie des prévisions négatives de ce dispositif.

Les représentants des forces de l’ordre ont émis une réserve quant au fait que l’amende immédiate prive de la possibilité de relevé d’empreintes des usagers de drogue interpellés pour alimenter le FAED*. Qu’à cela ne tienne, il leur sera remis une convocation à se rendre au commissariat dans les 48 heures.

Simplification ?

• Les mineurs sont exclus de l’application de l’amende forfaitaire.
Leur cas sera examiné par une mission d’information ultérieure qui déterminera quel genre d’interdit pénal peut être approprié aux plus jeunes consommateurs de drogues.
(En 20 ans, le nombre de mineurs mis en cause pour ILS a été multiplié par 4 (x2 pour les majeurs). Dans le même laps de temps, les condamnations pour ILS des moins de 18 ans sont multipliées par sixob_ebaa90_link-ext.jpg )

• Les usagers de drogues ayant des antécédents judiciaires et ceux en récidive sont exclus eux aussi. À ces cas, la procédure de droit commun (garde à vue, etc) s’applique.
Les notions de récidiviste et de primo-délinquant sont toutefois pratiquement un non-sens s’agissant de la consommation de drogue, qui par définition et dans les faits, désigne une conduite réitérée.

Logique et responsable ?

• Exclus aussi du dispositif, les usagers de drogue problématiques.

Il reviendra au procureur de définir ce qu’est un "usager problématique".

« il appartiendra aux parquets (via une circulaire générale du garde des sceaux), maîtres de l’opportunité des poursuites, de préciser dans le cadre de leurs instructions le "profil" des personnes susceptibles de ne pas se voir infliger l’amende forfaitaire. »

Et il incombera aux policiers et gendarmes de les identifier selon les instructions du Parquet, et d’appliquer la procédure habituelle.
Ce qui relève de la santé de l’usager de drogues, d’une conduite à risques qui pourrait faire l’objet d’une mesure spécifique, devra donc être évalué sur la voie publique dans le temps de l’interpellation.

Autant dire qu’il s’agit là d’une porte grande ouverte à l’approximation, l’erreur de discernement, voire à l’arbitraire.


Conséquences et incohérences


À la lecture de ce rapport, on se rend compte qu’au fur et à mesure que les modalités de ce nouveau dispositif sont décrites et discutées, autant de contraintes, de complications et de contradictions s’y ajoutent quand il s’agit de réprimer le simple usage de drogues.
Et à entendre les divers débats et tables rondes de cette mission d’information, même les deux parlementaires émettent des réserves, et semblent parfois douter de la validité de cette mesure…
Cette forfaitisation sera donc expérimentée sur un temps limité à une échelle locale.

Ce dispositif d’amende forfaitaire délictuelle n’a encore jamais fait ses preuves ni même été appliqué.
Le gain de temps pour la police et la justice, argument initial pour sa mise en place, est non seulement difficile à évaluer, mais vu les exceptions à cette nouvelle règle, et vu le nombre de recours qui s’annonce massif, il sera probablement dérisoire.

L’amende forfaitaire est la solution retenue car elle permettrait d’harmoniser la réponse pénale jugée illisible et disparate d’un parquet à l’autre.
Or, l’individualisation de cette réponse est pourtant indispensable s’agissant d’une conduite individuelle ayant une incidence sur la santé. C’est en tout cas ainsi - aussi incohérente et inefficace soit-elle - que la loi considère l’usage de drogue, infraction figurant dans le code de la santé publique.

Ce dispositif exclut donc de fait d’assortir une mesure sanitaire à la répression pénale.

Il est toutefois prévu la mention d'une adresse de structure prenant en charge les toxicomanies et addictions au verso de l’avis de contravention.
Ouf. L’esprit de la loi de 1970 est donc sauvé...

Il s’agit d’une sanction discriminante à plusieurs titres.

• Selon les modalités mêmes de cette procédure, un primo-délinquant redevable d’une amende pourrait être sanctionné plus sévèrement qu’un récidiviste, dirigé vers un magistrat qui lui ferait un rappel à la loi, ou ordonnerait une injonction thérapeutique.

• Cette procédure simplifiée s’appliquera sans surprise à une population bien spécifique : celle des quartiers populaires, jeune, la moins solvable, et surtout la plus vulnérable d’un point de vue sanitaire et social.
Les chiffres indiquent pourtant que les classes moyennes consomment davantage que les plus précaires. Et aussi que toutes les tranches d’âge sont concernées par l’usage de drogues.

Alors est-ce véritablement l’usage de drogues qui pose problème ?

La répression s’applique-t-elle à une conduite individuelle à risques, ou plus confusément, à un comportement ou à des individus ?

Le ministre de l’Intérieur donne une réponse sans ambiguïté à cette question.


Tout ça pour ça…


Après que le rapport de la mission d’information parlementaire lui ait été remis, le ministre n’évoque plus que le cannabis (Europe1 le 25 janvier 2018) Dans ce document, et de façon récurrente, les deux députés insistent pourtant sur le principe, important selon eux, de ne pas faire de distinction entre les stupéfiants, ce qui avait mis tout le monde d’accord.

« (les rapporteurs) considèrent, en outre, que cette procédure d’amende forfaitaire doit concerner tous les stupéfiants sans distinction juridique ou de politique pénale selon le type de substance en cause. En effet, l’évolution de la composition des différents stupéfiants, l’apparition de « nouveaux produits de synthèse » (NPS) et le développement de la poly-consommation font que la distinction entre « drogues douces » et « drogues dures » n’est plus pertinente aujourd’hui. Par ailleurs, cette distinction pourrait accroître le sentiment de « banalisation » du cannabis dans l’opinion alors que sa consommation atteint un niveau préoccupant en France, notamment parmi les jeunes, et que sa composition en THC a beaucoup évolué ces dernières années. »

Bref, plus personne ne parle de stupéfiants ni ne s’interroge de la subtilisation de ce mot dans le discours, c’est le cannabis qui fera recette sans qu’on comprenne pourquoi les autres drogues sont écartées de cette forfaitisation.
Les uns feront donc l’objet d’une amende, et les autres resteront sous le coup de la loi de droit commun. Rendant donc sans objet l’argument d’équité de traitement par la forfaitisation, et faisant du même coup perdurer le mythe de la drogue dure et de la drogue douce, au mépris de la réalité des usages de drogues.

Mais surtout, on apprend (BFM le 9 février 2018) que la contraventionnalisation de l’usage de cannabis fera partie d’un ensemble de forfaitisations de petits délits, manière de taper tout de suite au porte-monnaie pour travailler à la reconquête républicaine de certains quartiers, charge à la nouvelle police de sécurité du quotidien d’encaisser le jackpot contraventionnel, de préférence sur place et sans délai.

L’usage de drogues (de cannabis, donc) se trouve purement et simplement classé dans la catégorie des incivilités et ne serait in fine qu’un problème d’ordre public.

En 1970 la loi s’était fixé, en théorie, de sanctionner pénalement les seuls usagers se soustrayant aux soins. Avec le temps, le prétexte sanitaire de la répression est apparu de moins en moins évident, avec la contravention il est purement et simplement dissocié de l’usage de drogues.

Quant à la "police de sécurité du quotidien", on va se dépêcher d’oublier qu’elle aurait pu être le vecteur d’un apaisement et d’un rapprochement avec la population, notamment celle avec qui elle partage crainte et inimitié. Oubliée aussi, la prévention, celle qui fait partie des missions de police un peu trop négligées, qui ne connaît pas la politique du chiffre mais donne du sens au principe de service public.

Le ministre de l’Intérieur, parangon de la révolution numérique pour une police du XXIème siècle, fera de ces îlotiers équipés pour une optimisation du rendement, les artisans d’une police sans âme, et d’impopulaires collecteurs de taxes pour un État proxénète irresponsable.


Moralité de l’histoire : un rendez-vous manqué avec la raison


Avec cette grosse usine à gaz de forfaitisation, une fois de plus, la question impérative sur la politique des drogues et de santé publique est contournée.
La prohibition et la répression restent le principe, sourd à tous les signaux d’alarme qui s’allument les uns après les autres.

Le constat de l’inutilité de la répression de l’usage de drogues est unanime.
Les pays qui y ont renoncé en tout ou partie, n’ont pu qu’observer des résultats positifs, tant en matière de santé publique, de réduction des risques, et de sécurité.

En juin 2017, l’OMS et l’ONU dans un communiqué conjoint appellent à "Réviser et abroger les lois punitives qui se sont avérées avoir des incidences négatives sur la santé et qui vont à l’encontre des données probantes établies en santé publique (s’agissant de) consommation de drogues ou leur possession en vue d’un usage personnel".

La prohibition génère une insécurité incontrôlable liée au trafic, notamment celui du cannabis qui représente un important marché, à la mesure du nombre de consommateurs.
Le trafic n’a que faire de l'interpellation et la répression des usagers ou de la forfaitisation, les prix sont stables, signe qu’il se porte bien, et à force de réactivité et d’adaptation, il a souvent une longueur d’avance sur l’action policière.
La régulation du marché du cannabis est une question qui ne pourra d’ailleurs pas être évitée ad vitam aeternam.

Il y a urgence à changer de politique.

L’information et la prévention sont inaudibles, et quasiment clandestines, l’usager-délinquant privilégiant la discrétion à la réduction des risques.

L’interdit participe largement au problème de santé publique. De nouveaux produits apparaissent régulièrement, la cocaïne est de plus en plus pure, la festive MDMA s'invite dans les Samu, le taux de THC du cannabis de rue est élevé, le Fentanyl - qui a fait baisser l’espérance de vie aux USA, depuis deux ans, à coups d’overdosesob_ebaa90_link-ext.jpg est désormais un produit de coupe de l’héroïne en France. Etc.

Informer sans tabou, prévenir et soigner sont les seules options d’intérêt général. La dissuasion ne passe pas par la répression. Les mineurs n'ont que faire des interdits, bien au contraire. Et l’usage de drogues ne peut raisonnablement pas être résumé à un trouble à l’ordre public, et n’avoir qu’une approche sécuritaire après bientôt 50 ans de prohibition en échec.

Si le travail de la police et la justice doit être concentré sur le trafic - un autre prétexte sibyllin de la forfaitisation - qu’à l’instar du Portugal, les usagers interpellés avec une quantité de drogue limitée à une consommation personnelle, soient dirigés, via une procédure administrative, vers une commission qui se chargera d’évaluer leur situation sanitaire et sociale, et décider de la suite à donner.

Et que l’usage de drogues soit purement et simplement dépénaliséob_ebaa90_link-ext.jpg
Sans demi-mesure répressive.


source :

 

ILS : Infraction à la Législation sur les Stupéfiants
TAJ : Traitement des Antécédents Judiciaires
DACG : Direction des Affaires Criminelles et des Grâces
FAED : Fichier Automatisé des Empreintes Digitales

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Salut 

 

Rien de nouveau sous le soleil , le pognon d'abord la bêtise ensuite et le peuple on verra si on a le temps de s'en occuper ....

 

A++

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Hello

 

une lettre ouverte au president Macron qui vient d'un ....... gendarme .....

 

@+

 

Lettre d'un gendarme au Président Macron.

#cannabis #prohibition #gendarmerie

Rendons hommage à Jean Luc, gendarme, à qui, un jour, nous édifierons une statue en honneur à son courage pour avoir combattu une prohibition contre une plante injustement criminalisée.

Après avoir écrit une première lettre au président Hollande, il récidive avec une nouvelle lettre destinée au président Macron :


Monsieur le Président de la République Emmanuel MACRON,

 

Le législateur refuse toujours aujourd'hui au citoyen le droit d'amendement et ne souhaite partager le monopole de l'initiative législative qu'avec le gouvernement. La voie des urnes suivie de la plus parfaite passivité politique n'étant à l'évidence ni la meilleure ni la seule option, il m’apparaît que l'intervention citoyenne lors de la fabrication d'une loi peut largement servir le progrès de la société et l'intérêt général.

 

C'est pour cela qu'en 2012, encore en activité au sein de la Gendarmerie Nationale, puis en 2015, retraité de l'Arme et enfin dégagé des obligations de réserve attachées à mon statut, je prenais publiquement position contre la pénalisation de l'usage des stupéfiants. J'y argumentais en faveur d'une régulation légale de la production et de l'usage propre, d'une part à assécher l'économie criminelle induite par une stupide et dangereuse prohibition, d'autre part à institutionnaliser la prise en charge sanitaire des situations problématiques et enfin à permettre l’auto-culture de cannabis dans un cadre associatif ou individuel.

 

Ma voix se joignait ainsi à celles, nombreuses et bien documentées, d'élus progressistes, d'universitaires, d'économistes, de médecins, de spécialistes de l'addiction et de la réduction des risques, de juristes, de travailleurs sociaux, d'usagers. Elle n'apportait au débat d'originalité que celle d'émaner d'un membre des forces de l'ordre, acteur quotidien de la sécurité publique, qui, en parfait désaccord avec la loi et la politique du chiffre menée en la matière, était résolu à ne l'appliquer sur le terrain qu'avec le plus profond respect d'autrui, une empathie sans faille et le discernement que la population est en droit d'attendre, voire d'exiger.


Ainsi, je n'ai jamais accepté d'abaisser ma fonction à celle de « chasseur de boulettes de shit » faisant toujours preuve d'une extrême tolérance à l'endroit des simples usagers quand l'ordre et la sécurité publiques n'étaient pas menacés. Parenthèse fermée.

 

Ces multiples recommandations et mises en garde, loin d'être prises en compte, ne furent traitées que par le mépris et l'obstination à refuser un débat de fond qu'il aurait été pourtant salutaire de mener. L'actualité met en évidence aujourd'hui encore la terrible erreur et l'accablante responsabilité des élites politiques d'alors dans la situation sanitaire et sécuritaire du pays ainsi que dans les relations entre la population et les dépositaires de l'autorité publique qui ne cessent de se dégrader chaque jour un peu plus.

Le renouveau politique que vous dites vouloir incarner à la tête du pays, à supposer qu'il prenne effectivement source aux plus hautes valeurs humanistes de notre démocratie et tourne résolument le dos aux postures idéologiques sans réel fondement scientifique, redonne enfin espoir à celles et ceux qui depuis des décennies tentent, sans résultat, de faire entendre le bon droit d'une juste cause.

 

Cependant, je souhaite vous faire part de mon inquiétude et de mon incompréhension au vu du rapport présenté par Messieurs Éric POULLIAT et Robin REDA, dans le cadre d'une « mission d'information relative à l'application d'une procédure d'amende forfaitaire au délit d'usage de stupéfiants » mise en place le 02 août 2017 par la Commission des Lois de l'Assemblée Nationale.

 

En effet, dès le préambule ce rapport précise que cette « mission n’a pas pour objet de réfléchir à la lutte contre la toxicomanie ou à la réforme de la loi du 31 décembre 1970 et qu'elle ne porte pas non plus sur une éventuelle légalisation du cannabis ».


Quelle ne fut pas ma stupeur en constatant que l'objet de cette mission élude les seules questions qui s'imposent en la matière. Quel inadmissible ratage !

En refusant ainsi d'enrichir sa réflexion par les progrès constatés ailleurs dans le monde, par les avancées de la science et par les perspectives économiques en jeu, tant agricoles qu'artisanales et industrielles, la représentation nationale n'ignore-t-elle pas sciemment les libertés fondamentales de quelques millions de concitoyens, dont certains atteints de graves affections ?


Ce faisant, ne commet-elle pas là une indigne déloyauté ?
Mais en assumerez-vous votre part de responsabilité Monsieur le Président de la République ?

Car enfin, dans cette affaire, la position de l'exécutif dont vous êtes à la tête avec Monsieur Édouard PHILIPPE est clairement illustrée par les propos de Monsieur Gérard COLLOMB lors de son audition du 11 juillet 2017 devant la Commission des Lois.

 

En ouverture de séance, la Présidente de la Commission, Madame Yaël BRAUN-PIVET, indique que l'audition du Ministre de l'Intérieur permettra d'évoquer l'ensemble du programme législatif à venir, en relation avec son ministère. Madame BRAUN-PIVET souhaite, en outre, que les questions de l'auditoire épousent un cadre large et constructif qui donne une vision globale des travaux législatifs dans les mois à venir. C'est dire combien l'intervention de Monsieur COLLOMB est, sans conteste, le véritable fil conducteur de la mission d'information qui m'occupe aujourd'hui.

 

Dans son propos introductif Monsieur COLLOMB accorde moins de deux minutes au thème de l'usage de stupéfiants. Prend-il toute la mesure de l'ampleur de ce phénomène de société ?
Ces délits induisent pourtant près de 175 000 interpellations par an et nécessitent, selon lui, environ 1 200 000 heures de procédures pour les forces de l'ordre ; auxquelles il convient probablement d'ajouter celles comptabilisées par les services douaniers de Monsieur Gérald DARMANIN ainsi que celles de l'institution judiciaire.

Mais plus encore que la brièveté du discours, c'est bien son contenu qui déconcerte avant tout. En effet, Monsieur COLLOMB déclare vouloir concentrer son action en agissant sur le court terme pour accroître l'effectivité de la réponse pénale ; il argue sans nuance en faveur de la « forfaitisation » de la peine, déplorant qu'avec « 175 000 interpellations on ne puisse constater que 40 000 condamnations dont la plupart ne sont que de simples rappels à la loi ou des amendes de faibles montants ». Après avoir souligné l'aspect assez peu répressif du dispositif, il rappelle à l'auditoire le caractère chronophage de la situation et précise ensuite souhaiter mettre en place une amende forfaitaire en conservant la possibilité d'un placement en garde à vue. Il clôt le sujet ainsi : « on a parfois parlé de dépénalisation du cannabis, ce n'est pas de cela qu'il s'agit ».

 

Ce n'est en effet pas de cela qu'il s'agit, bien au contraire aurait-il pu ajouter, puisque la solution prévue par Monsieur COLLOMB consiste, pour une large part, à doter les forces de l'ordre d'une batterie de tests salivaires, de balances électroniques et autres matériels connectés à l'aide desquels les gendarmes et les policiers qui, jusqu'à aujourd'hui chassaient « la boulette» dans les poches des usagers , seront bientôt conduits à chasser le nanogramme de THC dans les bouches bées de nos concitoyens, voyant ainsi redoubler leur rôle répressif au détriment de leur rôle de proximité, social et préventif.

 

Vouloir amplifier et systématiser des mesures répressives largement inefficaces et éculées, voilà qui ressemble à s'y méprendre aux anciennes pratiques politiques, celles de « l'ancien monde », fondées sur l'idéologie des cinq dernières décennies, privées du socle scientifique actuel, sourdes aux évolutions sociales, croupissant encore aux antipodes de la modernité pour laquelle vous dites combattre. Dans ce domaine comme dans bien d'autres, j'espère de tout cœur qu'elles seront bientôt définitivement révolues.

 

Ma plus intime conviction, et je la sais partagée avec beaucoup des personnalités auditionnées dans le cadre de cette mission d'information(1) ainsi qu'avec un large public, est que la gravité de la situation de notre pays quant à la prévalence des stupéfiants et l'insécurité induite par les circuits criminels adossés à la prohibition méritait de la part du Ministre de l'Intérieur – et c'est vraiment le moins que l'on puisse dire - un développement plus précis, une analyse plus fouillée et, idéalement, une ouverture vers une plus large initiative parlementaire. Les assemblées sont peut être enfin prêtes à produire en profondeur un travail pluridisciplinaire à la hauteur des enjeux de la question.

 

Je ne permettrais, cependant pas, de laisser penser que j'évoque ici une quelconque insuffisance du Ministre d’État. La lecture du décret n° 2017-1070 du 24 mai 2017 relatif à ses attributions nous apprend toute l'étendue et la complexité de sa tâche mais suggère, en creux, qu'il était illusoire, en quelques quatre ou cinq semaines, d'espérer produire une réflexion aboutie sur un sujet si vaste qui dépasse largement et en de nombreux points les seules compétences du ministère de l'intérieur.

 

Il est chez nous, Monsieur le Président, un scientifique d'une ancienne génération(2) qui faute d'argument face aux progrès récents de la recherche, peinant à se renouveler et n'ayant plus ou peu l'écoute de ses pairs, nous assomme dans les médias depuis une dizaine d'années avec une phrase maladroite de sa composition qu'il répète à l'envie :
«Pétard du matin, poil dans la main ; pétard du soir, trou de mémoire».


Il est facile, peut être même tentant, de laisser répondre en écho et en votre nom : « Pour réprimer mieux, nous réprimerons plus ».


Mais, vous satisferez-vous d'un tel embryon de débat où l'immobilisme le dispute à la cécité, et qui feignant le renouveau, consiste à adopter en la renforçant une vieille idée porteuse d’échecs et de troubles graves ?


Souhaitez-vous vraiment que la loi sur les stupéfiants en France ne soit pas écrite faute d'avoir été pensée ?

 

Nous ne sommes pas face à un contentieux de masse qui se réglera par une répression accrue mais bien en présence de l'habituel aveuglement politique des cinquante dernières années et de la réaction frileuse des tenants d'une époque déclinante. Ces fruits de l'antagonisme culturel et générationnel qu'on voit malheureusement encore à l’œuvre aujourd'hui doivent être combattus sans relâche et sans concession.

 

C'est dans cette optique, Monsieur le Président de la République, que je vous demande, le plus respectueusement du monde, d'agir sans retard contre cet anachronisme révoltant.
Jean-Luc Garcia

 

PS : Message partagé avec les députés de la commission des lois présents à l'audition du Ministre de l'intérieur le 11 juillet 2017, d'autres parlementaires que le sujet est susceptible d'intéresser ainsi certaines des personnalités auditionnées dans le cadre de cette mission d'information.

(1) : par soucis de concision, je tiens à votre disposition dans un document séparé la transcription des auditions.
(2) : http://www.academie1744-rouen.fr/membres-titulaires/

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