Les acides humiques : qu’est-ce que c’est ?


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Les acides humiques : qu’est-ce que c’est ?

William Texier est cofondateur de Terra Aquatica (ex GHE) et auteur de L’Hydroponie pour tous, Mama Editions. Depuis 1987, il travaille en Recherche et Développement dans l’hydroponie et la nutrition des plantes. Aujourd’hui, nous sommes heureux de l’accueillir pour une lectio magistralis sur les acides humiques. Bonne lecture !

 

Par William Texier

Les acides humiques qu’est-ce que c’est ? On les utilise sans toujours comprendre ce que ces mots veulent dire, entre autres parce que la nomenclature peut être trompeuse. La matière organique dans le sol se compose de différents éléments. L’humus est la partie aboutie de la décomposition, c’est-à-dire celle qui n’est plus sujet à aucune décompositions ultérieure, tous les éléments qui l’ont produit (plantes, animaux et microorganismes morts) sont entièrement décomposés, il n’est plus possible de reconnaitre la matière qui a produit cet humus ; cela ne représente qu’une petite partie de la matière organique d’origine. La partie insoluble de cet humus est appelée «humine», la partie soluble sont les «acides humiques».

 

Acides humiques (notez le pluriel) est le nom générique qui désigne l’ensemble des acides organiques solubles présents naturellement dans le sol. Ce n’est donc pas une molécule unique mais une large famille de composés qui ont des propriétés communes. C’est presque plus leur processus d’extraction qu’une structure particulière qui les caractérise. Il existe des millions de molécules sous le nom d’acides humiques, qui sont toutes composées essentiellement de carbone, d’hydrogène, et d’azote, avec des petites quantités de soufre et de phosphore. Elles s’articulent autour de chaines carbonées sur lesquelles se greffent différents groupes, avec des sites de charge négatives. Elles peuvent avoir aussi des terminaisons hydrophiles et d’autres hydrophobes. C’est cette variété de sites actifs qui les rend si précieuses.

 

On comprend pourquoi toutes les sources d’humique ne se valent pas ; parmi ces milliers de molécules différentes certaines sont à l’évidence beaucoup plus actives que d’autres. Certains chercheurs les considèrent comme un ensemble de molécules agglomérées, plutôt qu’une entité. C’est une manière de voir les choses qui reflète bien la manière dont les molécules d’acide humique agissent. Chaque partie de la molécule interagit de manière différente avec l’environnement, le sol et les racines des plantes.

 

Extraction

On peut utiliser n’importe quelle matière organique décomposée pour l’extraction. Par exemple le charbon, étant d’origine végétale contient des acides humiques, en particulier la lignite, charbon de basse qualité ; mais la source la plus commune, celle de la grande majorité des produits sur le marché est la Léonardite, qui a le plus au niveau d’acide humique comparé à toutes les autres sources telles que la tourbe, le compost ou le sol.

On peut penser à la Léonardite comme à du charbon qui ne serait pas complétement transformé. La matière organique a commencé sa décomposition dans des conditions assez similaires à la tourbe, puis cette matière a été enfouie par des mouvements géologiques, mais elle n’a pas subi  la pression et la chaleur nécessaires pour finir sa transformation. D’apparence, elle ressemble au charbon, une roche tendre, noire ou brune, qu’on trouve associée à la lignite.

 

Les gisements sont généralement à faible profondeur, en couches peu épaisses. On trouve des mines de Léonardite dans beaucoup de pays. En Europe il en existe un certain nombre : Espagne, Allemagne, Hongrie, Ukraine, pays Scandinaves, pour ne citer que quelques-unes des plus importantes.

 

Les détails du processus d’extraction ne sont pas communiqués par les fabricants, mais le principe reste toujours la même. L’acide humique étant soluble dans une base, l’extraction se fait à l’aide d’une base forte, généralement de l’hydroxyde de potassium, KOH. Cela laisse une quantité significative de potassium dans la solution. Pour obtenir de l’acide humique (notez le singulier) dans sa forme solide, il suffit d’acidifier la solution. L’acide se déposera en formant un sel d’humate de potassium.

 

Ce processus d’extraction est plus complexe que la description que j’en fais, il inclut un certain nombre d’étapes, filtration, purification etc... Depuis quelques années on extrait également les acides humiques à partir de bois tendres, déchets de scierie. C’est souvent du peuplier. Il y a peu d’opérations de ce type car peu de brevets ont été déposés pour ce type d’extraction. Le produit final ne peut pas s’appeler réellement «acides humiques», même s’ils en ont toutes les propriétés. J’aime bien le terme de lignohumate. Le procédé d’extraction est différent, utilisant entre autres chaleur, pression et traitement mécanique. Les détails du processus sont protégés par des brevets.

 

Quelle que soit la source ou la technique employée, il sort de l’extraction trois fractions : acide humique, ulmique et fulvique de poids moléculaires très différents. L’échelle de poids est vaste : les plus grosses molécules de la fraction humique sont 10 fois plus grosses que celles de la fraction fulvique. Humates, ulmates et fulvates désignent les sels de ces acides.

 

Acide humique

Cette fois au singulier car ce terme désigne la fraction la plus lourde des acides humiques. Termes trompeurs on distingue les acides humiques (pluriel) pour désigner l’ensemble de ces trois composants et «acide humique» singulier pour désigner la fraction la plus lourde. Cette identité de nom est une source de confusion pour beaucoup de gens. Il se compose de longues chaines de molécules avec un poids moléculaire élevé (10,000 à 20.000 g/mol) brun foncé tirant sur le noir. Sous forme liquide, il est toujours dans une solution basique, souvent à pH élevé, de couleur également de couleur noire. C’est le poids lourd de la famille, ce qui pour moi lui donne des propriétés autres que le fulvique, beaucoup plus léger. Je préfère l’utiliser en sol ou en bioponie (utilisation d’un engrais organique en hydroponie). En plus d’une bonne fumure, un ajout d’acide humique est la meilleure chose que vous puissiez faire pour booster votre sol.

 

Acide ulmique (ou hymatomel)

De poids moyen, cette fraction n’a étrangement aucune activité sur les plantes et n’est donc pas utilisé seule.

Acide fulvique

C’est vraiment l’autre extrémité de la famille, avec des poids moléculaires compris entre 2 000 et 8 000 g/mol. Ce sont des chaines de molécules beaucoup plus petites. Sous forme de liquide, il va du jaune vif au marron très clair. En poudre il tire plus vers un jaune orange, voir brun clair. Sa petite taille lui permet d’être absorbé facilement, par la racine ou par les stomates. C’est cette fraction que j’utilise en hydroponique, racines nues ou  substrat coco. Je l’utilise également en pulvérisation foliaire. Pour schématiser, l’acide humique agit plus sur le sol, même s’il y a des interactions directes avec les racines, l’acide fulvique agit plutôt sur la plante, mais a aussi des interactions avec le sol.

 

Action des acides humiques

Actions Physiques :

Un sol riche en humus est léger, souple, aéré et humide; c’est une source inépuisable de molécules utiles aux plantes et un environnement parfait pour les racines de beaucoup d’espèces. Les acides humiques modifient et améliorent le sol, l’acide humique ayant une plus grande persistance que le fulvique. Ils augmentent sa capacité de rétention d’eau, ainsi que son aération. Par exemple, ils peuvent décompacter un sol argileux en créant des canaux par lesquels l’eau peut pénétrer. Ils «tiennent» le sol et diminuent le risque d’érosion.

 

Actions chimiques :

C’est grâce aux acides humiques que des sels minéraux inorganiques peuvent rester dans la zone racinaire au lieu d’être lessivés au premier arrosage. Ils retiennent des éléments et en transforment d’autres, les rendent assimilables par les plantes, participant ainsi à la décomposition des matières organiques ; grâce à ces actions, Ils modifient également le sol. Ils augmentent la perméabilité des membranes cellulaires, ce qui améliore l’absorption des ions nutritifs. Ils ont un effet sur la température du sol et ralentissent l’évaporation, une autre  manière de garder le sol humide. Les acides humiques ont une grande capacité d’échange de cations, ce sont des agents chelatants qui améliorent l’effet tampon du sol. Un chélate, un mot qui veut dire pince, est une longue molécule organique qui agit en effet comme une pince, en séquestrant des ions métalliques. Elles retiennent ou relâchent ces ions en fonction du pH, assurant ainsi sa stabilité : c’est cela l’effet tampon. En même temps qu’ils assurent une réserve de nourriture pour les plantes, ils chélatent aussi les métaux toxiques du sol, s’il y en a, assurant qu’ils ne seront pas absorbés par vos cultures.

 

Actions biologiques :

Les acides humiques ont un nombre important d’interactions avec les plantes, cela commence dès le début du cycle car ils stimulent la germination. Je trempe toujours mes graines dans une solution d’acide fulvique pendant une douzaine d’heures, et j’augmente ainsi de manière significative le taux de germination.

 

Mais pour moi, l’action majeure c’est la stimulation de la croissance dans la zone racinaire, si important au début de la vie de la plante. Non seulement ils augmentent la masse racinaire, mais ils améliorent aussi la qualité des racines en favorisant la multiplication de poils absorbants. En même temps, ils accélèrent la division des cellules, ce qui accélère la croissance. Plus tard dans le cycle ils augmentent le contenu des vitamines dans la plante, d’une manière générale, ils améliorent la réponse des végétaux au stress abiotiques. En parallèle, ils stimulent l’activité microbienne et favorisent la prolifération de micro-organismes bénéfiques.

 

Je chéri ces molécules qui sont pour moi les meilleures alliées du cultivateur, en terre, mais aussi en hydroponie. J’ai longtemps cru qu’il me suffisait d’utiliser un très bon engrais dans ma solution nutritive (j’utilise TriPart, T.A.) pour voir des résultats spectaculaires. De fait, je voyais mes plantes pousser en excellente santé, pratiquement à vue d’œil. Ce n’est que lorsque j’ai commencé à utiliser des humâtes que j’ai changé d’opinion. Je cultive maintenant avec les nombreux alliés naturels que la nature nous offre, mais pour leurs actions si variées et pour leur prix modique, les acides humiques restent pour moi en tête de liste.

 

www.terraaquatica.com

 

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